À la veille du vote en plénière du Parlement de la Fédération Wallonie-Bruxelles du projet de décret instaurant un examen d’entrée aux études de médecine, la Fédération des Étudiants Francophones, la Fédération des maisons médicales, Médecins du Monde, la fédération hospitalière Santhea, Solidaris ainsi que la FGTB et la CNE invitent à la réflexion :
« Quel est encore le sens du contingentement des numéros INAMI au regard des objectifs de santé publique ? ».
Ensemble, ils signent un position papier dans lequel ils appellent à reconsidérer la politique de planification de l’offre médicale à la lumière des enjeux de santé publique. Et ce en 6 six propositions concrètes.
Dans notre pays, la politique de planification de l’offre médicale mise en oeuvre depuis 1997 s’est centrée exclusivement sur la stabilisation de la force de travail sans se poser la question des besoins. Cette politique a été conduite de manière isolée de la planification des autres professions de santé et sans tenir compte des autres aspects importants influençant l’offre de soins tels que le financement du système de soins de santé et la rémunération des prestataires, l’organisation de la pratique et le partage des compétences ou encore les innovations technologiques.
Aujourd’hui, nous pouvons tous faire le constat que cette politique ne fonctionne pas. Non seulement elle n’a pas permis de maîtriser la dépense mais elle n’a pas non plus été adaptée pour répondre à la chute des effectifs observée pour différentes disciplines médicales. Alors même que l’on constate aujourd’hui un déficit de médecins formés en Communauté flamande où un examen d’entrée est d’application depuis 20 ans, on s’apprête à imposer un même système de filtre à l’entrée des études de médecine en Fédération Wallonie-Bruxelles, tout en continuant d’importer des médecins de l’étranger pour répondre aux pénuries observées.
La Fédération des Etudiants Francophones, la Fédération des maisons médicales, Médecins du Monde, la fédération hospitalière Santhea, Solidaris ainsi que la FGTB et la CNE appellent à sortir d’une politique de planification de l’offre médicale basée sur des dogmes et dictée par des considérations corporatistes et communautaires. Il s’agit là d’un enjeu de santé publique essentiel !
Nous plaidons pour une approche globale et concertée basée sur les besoins avec l’objectif de définir le nombre de praticiens et de services nécessaires pour conserver le niveau de santé de la population belge. Ceci suppose de disposer d’un cadre général de la force de travail en soins de santé qui soit intégré et cohérent mais aussi flexible pour pouvoir s’adapter aux évolutions du système de santé. Cette mission doit être confiée à la Commission de planification de l’offre médicale, comme le suggérait déjà le Centre Fédéral d’Expertise en 2008.
Nous formulons, par ailleurs, six propositions concrètes pour adapter dès à présent le système de contingentement :
- Sortir du contingentement la médecine générale et les autres spécialités en pénurie identifiées par la Commission de planification. Il faut un signal clair que les médecins formés dans ces disciplines auront un accès libre aux numéros INAMI.
- Fixer des « sous-quotas » par discipline médicale. C’est essentiel pour orienter les postes de formation en fonction des besoins identifiés pour chaque spécialité.
- Dissocier l’accès aux études de médecine de l’accès aux numéros INAMI. Les mécanismes de sélection à l’entrée des études de médecine sont injustes socialement. Qui plus est, en contingentant ses propres jeunes, tout en restant ouvert aux médecins formés à l’étranger, le système organise la « dépréférence nationale ». Enfin, ces mécanismes sont inefficaces : ils ne permettent ni de sélectionner les meilleurs médecins ni –pour ce qui concerne l’examen d’entrée - d’aligner le nombre d’étudiants formés sur les quota de numéros INAMI.
- Assurer aux facultés de médecine les moyens nécessaires pour qu’elles soient en mesure de garantir une formation de qualité aux étudiants. Il faut en particulier prévoir suffisamment de places de stages, sans quoi un numérus clausus s’imposera de facto aux médecins formés qui débutent leur spécialisation.
- Mettre davantage en valeur les orientations en médecine « non-curative » durant la formation. Ces domaines emploient une proportion variant entre 11 et 17% de la population de médecins de moins de 66 ans et l’offre actuelle est largement insuffisante par rapport à la demande.
- Mettre en place une politique plus volontariste de l’installation. Aujourd’hui, certaines zones géographique connaissent une pénurie sévère de médecins généralistes alors que d’autres sont en situation de pléthore. Pour garantir une accessibilité aux soins de santé de première ligne dans toutes les régions du pays, la planification doit aussi intervenir au niveau de l’installation des praticiens.
Lire le position paper :
Signataires
Christophe Cocu – Secrétaire général de la Fédération des maisons médicales
Marc Goblet – Secrétaire général de la FGTB
Jean-Pascal Labille – Secrétaire général de Solidaris Mutualité
Maxime Mori – Président de la FEF
Michel Roland – Président Médecins du Monde
Yves Smeets – Directeur général de Santhea
Felipe Van Keirsbilck - CNE