Depuis quelques années nous avons tous pu constater l’augmentation des difficultés psychosociales dans la population au côté de laquelle nous travaillons. Elles ont augmenté en nombre, en gravité et en complexité. Cette aggravation est telle qu’elles constituent, aujourd’hui, un frein important à l’accès effectif aux soins, y compris dans nos maisons médicales.
Du côté des usagers, ce frein se manifeste d’abord par les difficultés à assurer la subsistance au quotidien, même pour certaines catégories de travailleurs, par la place que prend cette préoccupation dans la vie de tous les jours, par les multiples soucis du quotidien, qui prennent une proportion telle qu’ils empêchent de faire les démarches nécessaires pour sa propre santé et celle de sa famille, par la multiplication des situations d’exclusion sociale. Mais on voit aussi que la détresse psychologique causée par ces conditions de vie fait obstacle à une utilisation raisonnée du système de soin. Beaucoup de gens passent un cap, basculent dans une autre réalité et se réfugient dans l’isolement, le déni, le repli sur soi, l’imaginaire et parfois l’agressivité.
Les professionnels ne sont pas toujours préparés à ce qui s’apparente à un raz-de-marée. Nos structures ne sont pas organisées pour ça. Beaucoup d’intervenants ne se sentent pas outillés pour recevoir ces situations. Beaucoup sont simplement débordés par les demandes d’aide. Pour certains, les situations touchent quelque chose en eux-mêmes qu’ils ne peuvent plus supporter.
Ces problématiques nous obligent à repenser notre organisation, les limites et les cadres des champs professionnels, et les relations avec nos partenaires. Sans quoi, notre attachement à l’accessibilité ne sera qu’un souhait.
Depuis 2009, le SPF santé a pris une série d’initiatives qui visent à transformer le contexte dans lequel ces enjeux se déploient. La réforme psy107 d’abord, la réforme des soins pour enfants et adolescents ensuite, constituent les premiers éléments d’une nouvelle politique en santé mentale qui fournit des opportunités de changement à tous les niveaux de l’organisation des soins. C’est une occasion de réaliser dans le concret notre projet de transformation du système de santé.
L’objectif général est d’organiser, dans les maisons médicales, l’accompagnement psychologique et social de première ligne, articulés entre eux et avec la prise en charge biomédicale, dans la perspective du centre de santé global bio-psycho-social. Pour y parvenir, il faut définir le rôle du premier échelon dans les soins de santé mentale, affirmer un rôle spécifique de co-responsabilité sur un territoire, et formaliser l’articulation avec la seconde ligne, avec l’échelon zéro, et avec l’ambulatoire spécialisé. A terme, bien entendu, l’enjeu est d’obtenir la reconnaissance de ce rôle, sa définition et son financement à un niveau officiel.
Le programme a démarré le 1er septembre 2015. D’ici fin 2015, nous essayerons d’avoir engrangé les résultats suivants : inventaire des initiatives existantes, identification des parties prenantes en-dehors du mouvement (partenaires, interlocuteurs, financeurs), mobilisation des ressources dans le mouvement, organisation/planification de la journée des travailleurs sociaux, définition de la suite du projet accessibilité, organisation des représentations locales dans les nouvelles structures en santé mentale. Par la suite, sera mis sur pied un programme de formation en santé mentale, à l’organisation d’une journée des psychologues, et au lancement d’une étude sur l’épidémiologie de la santé mentale en maison médicale.