Si la norme est la loi du plus grand nombre, que deviennent les minorités, telles que les plus gros ou les sourds ou, maintenant, les fumeurs ? Et quand les minorités, contre la tyrannie et la norme, revendiquent leur identité, où est la légitimité de la santé publique et de ses recommandations ?
En guise de hors-d’oeuvre à cet article, un magnifique poème de Philippe Lecorps. Le lecteur rassasié pourra s’en contenter...
Oh l’Obèse !
Tu te traînes,
t’as mal aux genoux,
t’as mal au dos,
tu t’essouffles, t’es en sueur,
tu encombres !
T’es de trop dans l’ascenseur,
il va pas démarrer.
Tu t’trouves pas d’habits,
des chaussures renforcées.
Fais gaffe à ta chaise, tu débordes.
T’appuie pas sur le dossier, il pourrait
s’écrouler.
C’est pas des poignées d’amour que t’as !
Pauvre tache !
Tu vas mourir graisseux !
T’es pas normal !
T’as vu le regard à droite.
Elle te soupèse,
du mépris dans la prunelle.
Tu te dégoûtes ?
t’as raison, si t’étais un homme, un vrai,
tu aurais de la volonté,
nom d’un petit bonhomme !
Tu serais le grand ascète maigre de tes
rêves.
Toutes tes pensées seraient d’une telle
intensité,
qu’elles brûleraient les calories stockées
pour toi depuis le début du monde,
par les anciens de tes anciens,
pour que tu ne manques de rien.
Ils t’ont fait rond et chaud,
pour qu’on te parle doucement,
joyeusement,
qu’on te caresse
et jouisse du confort de ton ventre-oreiller.
Pour qu’on t’habille de baisers.
Pour le reste, les surplus, patience !
Francis Blanche disait :
« mourir gros, mourir maigre,
la différence est pour le porteur ! »
Extrait de Vivre le corps que je suis ! Gourmandise en prose de Philippe Lecorps (De l’alimentation à la santé. La santé de l’homme 2002, 358,15-44).
La loi du plus grand nombre
« Tout doux, tout rond ! on dirait Winnie
l’Ourson ! La norme n’est que la loi du plus
grand nombre ! Moi, je ne suis comme
personne et j’assume ! Y’a quelqu’un à qui
ça pose problème ? ».
Ce message enjoué est signé Carolum (1m60, 90 kilos), qui se présente ainsi sur le forum des nouveaux adhérents à « Allegro Fortissimo non conformes ». Le site de ce mouvement français est consistant : on y trouve un agenda d’activités pour obèses, dont des ateliers de mouvement centrés sur la redécouverte, dans le plaisir, de son corps, une liste de 600 boutiques « grandes tailles », l’adresse d’une cinquantaine de points-relais. Beaucoup d’autres choses, notamment quelques échos d’une étude internationale. Celle-ci observe qu’en France, 26 % des adultes sont en sur-poids, et 8,3 % « en obésité ».
« Quel est l’intérêt de savoir que les Français sont plus grands et plus gros qu’il y a 36 ans ? », questionne le commentateur de ces chiffres. « Eh bien, pour adapter leur environnement ! ». Suivent une pétition adressée à la SNCF (demandant entre autres une adaptation des banquettes dans les trains), un manifeste contre les régimes, un point juridique relatif à la convention AERAS [1] , le compte-rendu d’ateliers menés lors du Congrès de la médecine générale consacré aux « personnes obèses qui s’éloignent trop souvent des cabinets médicaux » et intitulé Les malentendus entre médecins et personnes obèses, un dialogue possible.
Le message de Carolum illustre bien les différents sens du terme « norme ». « Loi du grand nombre » : eh oui, du point de vue statistique, est défini comme normal ce qui se rapproche le plus d’une moyenne observée dans un groupe, soit, toujours, la majorité des sujets. Les personnes en surcharge pondérale ne sont donc pas dans la norme statistique. Quoique... 34 % des adultes en surpoids (dont certains obèses), ça fait un tiers de la population : solide poids dans la balance, souligne Allegro Fortissimo ! Les gros ne sont plus vraiment à la marge et si l’« épidémie » du surpoids s’étend, c’est la norme qui changera : alors autant prévoir et adapter l’environnement !
« Il y en a à qui ça pose problème ? ». Mais bien sûr, Carolum, il y en a même beaucoup ! Ceux qui veillent à la santé des gens, d’abord : l’obésité est reconnue comme une pathologie en soi et un facteur de risque pour les pathologies cardio-vasculaires et le diabète. Le calcul du BMI est une norme permettant de classer les personnes pour qui il convient d’intervenir. Mais la surcharge pondérale est un phénomène complexe et multifactoriel, les soignants sont souvent démunis, mieux vaut prévenir que guérir : plusieurs ministères de la santé en Europe ont mis en place, pour lutter contre cette nouvelle épidémie, des programmes nationaux, surtout centrés sur la « malbouffe » et le manque d’exercice physique : il faut tout mettre en oeuvre pour modifier, corriger les comportements malsains. Certains relais proches de la population sont invités à se joindre aux efforts (les enseignants, par exemple). Bien avisée, l’industrie agroalimentaire s’en mêle (turbo sur la fabrication de « produits allégés »). Et bien sûr, l’industrie pharmaceutique tire les marrons du feu : pilules, repas-régimes, crèmes anti-cellulite et autres bouffeurs de graisses... miracles à la pelle !
Rien de moins neutre qu’une norme, donc. Et, d’un point de vue sociétal -les gros le savent bien - qui dit norme dit jugement, appréciation, rejet... Indésirable d’un point de vue strictement sanitaire, le surpoids l’est aussi d’un point de vue social, parce qu’il s’écarte de normes esthétiques perçues comme universelles, même si elles sont différentes dans certaines sociétés, même si un bébé bien joufflu reste apprécié, et même si « les grosses » excitent des fantasmes sexuels torrides (ce qui, loin de réhabiliter leurs charmes, souligne en fait leur monstruosité : tapez « grosses » sur Google, c’est édifiant).
Les normes sociales, ce sont des manières d’être, de faire, de penser, que chacun acquiert tout au long du processus de socialisation, par un double cheminement : un apprentissage cognitif indiquant ce qui est permis et interdit, et un processus d’intériorisation qui consiste à « lier dans le psychisme, plus ou moins profondément et inconsciemment, l’image de soi de l’acteur et les actions qui sont recommandables » (Ferrant). Ainsi, plus l’individu s’approprie les valeurs qui sous-tendent la norme, plus il souffre de n’être pas conforme : la transgression d’une norme intériorisée « entraîne un sentiment subjectif de culpabilité, le sentiment de s’être trahi soi-même et d’avoir perdu une cohérence identitaire… » [2]
Disgracieux, les gros sont en outre des pécheurs : leur apparence signale à tous qu’ils commettent le péché de gourmandise, qu’ils sont fainéants, et incapables de se maîtriser, et dépendants, et irresponsables... vis-à-vis d’eux-mêmes mais aussi vis-à-vis de la collectivité, puisque l’épidémie d’obésité risque d’entraîner des coûts importants. Ils sont donc anormaux dans leur être, dans leur agir, dans leur pensée... ?
« Depuis plus de trente ans », dit Marinette, « je souffre des effets de l’obésité... Je me suis battue contre tous les désagréments et ennuis en tout genre qu’apporte la vie en obésité, surtout quand elle est morbide. La souffrance physique, morale, l’impossibilité à se soigner, à trouver du travail, les difficultés pour avoir des enfants, les relations avec les messieurs, les moqueries, j’ai tout connu comme tous les gros. J’ai dû tomber à peu près dans toutes les arnaques à la perte de poids quand j’étais plus jeune et je me suis pas mal bousillé la santé avec tout ce que j’ai pris et fait pour perdre du poids. Depuis des années, je me battais aussi contre l’incrédulité des gens, des médecins, des administrations diverses à qui j’essayais de faire part de mes difficultés quotidiennes. J’avais cette impression d’être Don Quichotte et de me battre contre des moulins à vent particulièrement obtus et sourds, voire même souvent grossiers. Je rêvais de faire quelque chose, mais je ne m’en sentais ni la force ni la carrure ».
Marinette a aujourd’hui perdu 24 kg. Il lui en reste 124, pour 1m50. « J’ai, dit-elle, retrouvé quelque chose que j’avais perdu depuis très longtemps ; le respect de moi-même. J’ai retrouvé l’envie de vivre et de faire des choses comme tout le monde, je ne me vois plus seulement comme cette grosse-là dont personne ne veut. J’ai le courage d’affronter tous ceux qui pensent que les gros sont là pour faire rire ».
Sa perte de poids, Marinette la doit à sa rencontre avec l’association BOLD, l’association belge des patients obèses. Elle y a aussi, surtout, trouvé le soutien moral dont elle avait besoin pour s’en sortir. « J’ai aussi pu rencontrer les bonnes personnes, celles qui savaient vraiment comment m’aider. BOLD, pour moi, c’est le combat qui vise juste, c’est l’association dont j’avais rêvé sans pouvoir la réaliser. Ce sont ceux qui essaient de se donner les moyens de faire les choses comme il faut ».
BOLD s’attache, tout comme Allegro Fortissimo, à lutter contre la stigmatisation des patients obèses. Ce mouvement vise aussi à faire reconnaître l’obésité comme maladie chronique et à obtenir une réglementation des publicités miraculeuses sur les pertes de poids. Il veut favoriser une meilleure prise en charge des patients obèses, par l’information des médecins généralistes sur le traitement, par l’adaptation des cursus universitaires, par la revalorisation du statut des diététiciens ; il soutient aussi les démarches auprès du monde du travail pour que l’obésité soit traitée au sein de l’entreprise.
GROS (Groupe de Réflexion sur les Obèses et le Surpoids) va dans le même sens. Cette association de professionnels (médecins, diététiciens, psys…) s’insurge contre la virulence de certains messages : « L’excès de réserves graisseuses fait aujourd’hui l’objet d’un ostracisme qui a pris des proportions sidérantes… à la souffrance somatique s’ajoutent celles, encore plus terribles, de la marginalisation et de la culpabilisation ». Souffrances loin d’être bénignes : « Dès le plus jeune âge, la crainte de devenir gros isole ceux qui dépassent les courbes admises, pointant d’emblée la différence ; difficile de cacher ce qui se voit dans un monde qui valorise la minceur et qui le rappelle inlassablement dans les messages publicitaires et les mises en garde contre les facteurs de risque. Ce qui n’est pas conforme devient hors la loi et facteur de discrimination de manière presque inconsciente pour tous… Le gros devient celui à qui on ne veut surtout pas ressembler ».
Au niveau des soins, le GROS rejette toute approche normative de l’obésité : « Nous ne soignons pas des statistiques et notre objectif n’est pas de faire tomber des records à coups de kilos perdus. Notre objectif n’est pas davantage de rendre conformes des corps démodés. Nous ne prenons pas non plus en charge des maladies, qu’il s’agisse d’obésité ou de BMI, de Bulimia nervosa ou de Binge eating syndrom : nous avons à faire avec des personnes véritables… L’individu qui vient chercher de l’aide auprès de nous a une histoire et ses difficultés ont un sens qu’il convient de prendre en considération, faute de quoi la relation qui s’établit entre le thérapeute et son patient prend un tour violent et insensé. Faute de savoir ce que signifie être gros ou maigrir pour la personne qui nous fait face, nous ne pouvons qu’exercer sur elle -souvent à sa demande une violence ».
Ce groupe de réflexion estime que l’obsession diététique représente aussi un danger pour l’ensemble du corps social : la distinction établie entre aliments recommandés et aliments déconseillés « ne peut qu’aboutir à une désorganisation alimentaire augmentant l’anxiété des consommateurs. Manger, d’acte social, d’acte de réconfort, devient un acte dangereux pour le poids et la santé ».
Cette affirmation-là, vous la trouverez sur le site de la Fédération Francophone des Sourds de Belgique (www.ffsb.be). Car les sourds affrontent aussi le regard des gens normaux. Certains d’entre eux se sont récemment mobilisés contre le dépistage précoce de la surdité chez les nouveau-nés, qui se met en place en France et en Belgique. Il s’agit de dépister la surdité dès les premiers jours après la naissance, en vue de proposer un implant cochléaire qui, donnant une certaine capacité d’audition, facilite l’apprentissage du langage oral. Pour être pleinement efficace, ce dispositif doit être posé très tôt.
Cette stratégie permettra, explique la ministre Fonck (http://sentendreblogspot.com) « d’organiser l’ensemble de la filière de soins, du dépistage à la prise en charge optimale des enfants dépistés positifs, y compris la prise en charge dans un centre de revalidation après l’implantation… Le dépistage précoce permet de maintenir l’enfant dans un système scolaire traditionnel, en évitant la création d’écoles spéciales pour malentendants. Il lui permet un avenir d’intégration dans la société, avec un développement intellectuel normal et une possibilité d’être socialement actif. Le budget de l’INAMI s’en trouverait allégé ».
Le problème, c’est que la surdité est alors vue comme un problème uniquement médical : danger pointé dans une pétition lancée par le Centre d’Information sur la Surdité d’Aquitaine (www.cis.gouv.fr) qui s’adresse au Comité Consultatif National d’Ethique pour lui demander de s’intéresser à la problématique du dépistage. Or, les sourds refusent l’étiquette de malades ou de handicapés : toujours sur le site <http://sentendreblogspot.com> , Bernard Lemaire, sourd profond, époux d’une sourde, père de deux filles sourdes, petit-fils de sourds, arrière-petit-fils de sourds, exprime son refus que la surdité devienne la sixième maladie grave du nouveau-né (à côté de la phénylcétonurie, de l’hyperthyroïdie congénitale, de la drépanocytose, de l’hyperplasie congénitale des surrénales et de la mucoviscidose) : « Depuis quand la surdité a-t-elle de lourdes conséquences sur le développement socio-affectif ?… Le dépistage est une insulte… ».
L’inquiétude des opposants au dépistage, c’est que celui-ci risque d’entraîner « la disparition d’une communauté... constituée de personnes autonomes et épanouies, appartenant à une minorité linguistique et socio-culturelle possédant une très belle langue : notre langue des signes ». Ils s’inquiètent parce que le dépistage risque d’entraîner « la disparition d’une communauté... Le monde des sourds risquerait de disparaître à cause des manipulations génétiques du futur et des progrès des implantations cochléaires ». En effet, le dépistage précoce est motivé par la volonté de privilégier, dès le plus jeune âge, l’apprentissage du langage oral. Il y a ici un enjeu essentiel : on connaît les débats déjà anciens qui ont eu lieu autour de la LDS longtemps décriée voire interdite au profit de l’oralisme censé permettre une meilleure intégration des sourds dans le monde des entendants, au prix d’un appauvrissement du vocabulaire et de l’expression. Les réactions contre le dépistage précoce s’inscrivent dans la lutte des sourds pour se faire reconnaître comme une communauté ayant le droit de préserver et de transmettre sa culture.
L’aspect identitaire du combat contre le dépistage précoce est dès lors très marqué. Motivée par le souci d’intégrer l’enfant sourd dans un circuit « normal », cette stratégie va-t-elle tenir ses promesses ? « Pas sûr », écrit Souka, « Si l’enfant sourd n’a pas la langue des signes comme première langue,... l’intégration me paraît tourner le plus souvent à la désintégration. Placer un enfant sourd dans une école où il n’y a que des entendants... aboutit, avec l’oralisation forcenée, à faire de nos enfants de ’faux-entendants/mauvais sourds’ qui trouvent difficilement leur place dans notre société ». Lucienne, elle, vit « le retour de Julien dans l’enseignement pour sourds comme une délivrance et pas comme un échec. Je ne trouve pas normal que nos enfants doivent travailler trois fois plus que les autres dans les écoles pour entendants. On leur vole leur enfance ».
Au contraire, des écoles spécifiques permettraient aux sourds de suivre un enseignement réellement adapté, et d’assumer pleinement leur identité de sourd -quel bonheur ! Ecoutons Bernard : « J’ai passé cinq années inoubliables à Gallaudet. C’est comme une mini-ville des sourds : cafétéria, librairie, bibliothèque, piscine, stadium de sport, hôtel chic, salles de conférences... Dans Gallaudet, il y a une école primaire, une école secondaire et une université (au moins 1700 étudiants sourds). On y voit la langue des signes américains partout... Là-bas, je suis considéré comme un citoyen normal (d’où la fierté d’être sourd !) et pas du tout comme un membre d’une minorité... La vie sociale est merveilleuse... Les activités culturelles sont innombrables ».
Les avis sont parfois moins tranchés : certains pensent que l’oralisation (favorisée grâce à l’implant posé précocement) peut voisiner avec l’apprentissage de la langue des signes. Sans entrer dans ce débat complexe, soulignons que la question centrale tourne toujours autour de l’identité : « Je refuse complètement qu’on implante un enfant sourd si on l’implante pour effacer son identité de sourd », dit Rebecca, 20 ans, née sourde profonde. « Il m’a fallu 12 ans pour accepter ma surdité comme une richesse, porteuse d’une autre langue, d’une autre culture... 12 ans !!! Alors si on me parle d’implant pour effacer la surdité, ça me met en colère... Je pensais, quand j’étais enfant, que si je mettais des appareils pendant des années, je deviendrais entendante !!! Faux. Faux aussi avec l’implant. Alors, parents entendants d’enfants sourds, je vous supplie à genoux, si vous faites implanter votre enfant, que ce soit pour lui ouvrir des portes vers le monde des entendants SANS fermer la porte à la langue des sourds, au monde des sourds... dans un esprit d’acceptation totale de la richesse de la surdité, porteuse d’une culture belle et riche, que cela soit discuté, parlé, imagé avec l’enfant qui est aussi un être humain à part entière... Pour son identité. J’insiste. L’enfant sourd croit souvent qu’il ne va pas grandir car il ne voit pas d’adulte sourd. Quand j’étais enfant, je me rappelle très bien du jour où j’ai compris que j’allais grandir... (Je l’ai compris) avec ravissement en regardant deux adolescentes sourdes signer à la porte de l’école... Elles étaient comme ma mère ! Alors, j’avais aussi un avenir de femme ! ».
Les résistants sourds vont donc beaucoup plus loin que les obèses. Ils invoquent la richesse de leur culture, pratiquant ici ce que les sociologues appellent le « retournement du stigmate » : ce qui consiste à endosser l’étiquette qui leur est donnée et à en faire un objet de fierté. Non, les sourds ne sont pas sous-instruits, sous-cultivés, en dehors du « vrai monde » : ils revendiquent leur monde, « plein de joies, plein de vie, de chaleur, un Monde tellement sensuel, d’une sensibilité exacerbée » (Marie-Luce).
Autre facette de la question. Candice, maman d’un enfant sourd, déplore l’effet qu’aura le dépistage sur les premiers moments de la vie : « Avant 4 à 6 mois, l’échange entre parents et bébé est très charnel. On le porte, on le touche, on le regarde. C’est comme un apprivoisement. On n’est pas sûr de soi, de se comporter de manière adéquate, et puis il y a le bouleversement hormonal propice au baby blues. Il faut bien trois mois pour commencer à se sentir à l’aise. Tout ceci pour expliquer qu’on peut bien attendre que tout soit en place avant d’asséner le coup de la surdité ». Dans le même sens, Arnaud, sourd profond, papa d’un enfant entendant : « Je trouve troublant qu’on ne parle pas toujours des conséquences psychologiques d’un tel dépistage trop précoce sur les parents. Soyons clair : je suis d’accord avec le principe d’un dépistage néo-natal de la surdité mais pas du tout avec le délai d’exécution de ce dépistage (3 à 5 jours). Je prône clairement un dépistage de la surdité entre l’âge de 3 à 6 mois. Ce délai est nécessaire pour laisser aux parents le temps de ’s’approprier’ leur bébé. Ça s’appelle un phénomène d’attachement. Comme la surdité n’est pas une maladie grave, ni mortelle, je ne vois pas du tout la nécessité de bouleverser tout de suite les parents et de les plonger dans l’angoisse injustifiée car la naissance devrait être un moment de bonheur à préserver à tout prix ! ».
Enfin, Danielle rappelle une vérité universelle. Il s’agira pour les parents, quel que soit leur choix, de faire le deuil de l’enfant parfait... « N’oubliez pas que, même avec un implant, votre enfant est et restera sourd. C’est son identité à part entière et il ne faut pas espérer, en l’implantant, en faire un enfant entendant, car ce ne sera jamais le cas. Il s’agit d’une aide mais non d’une baguette magique qui transformera votre enfant ».
Tels se veulent les militants du réseau américain Vaccination Liberation, qui s’oppose avec virulence à la vaccination, norme de santé publique appuyée dans certains cas par une législation.
L’argumentaire se veut d’abord scientifique : il ne s’agit pas de contrevenir aux normes de production du savoir, mais bien d’y adhérer pour revendiquer la légitimité d’une parole. D’innombrables études sont citées, démontrant que la vaccination est toxique, qu’elle altère le fonctionnement du cerveau et de la fonction immunitaire, qu’elle entraîne des effets secondaires graves, qu’elle peut provoquer l’autisme, etc. Ces recherches ont été réalisées par des chercheurs compétents, qui ont le courage de dire une vérité dissimulée par le corps scientifique dominant, notamment sous la pression des firmes pharmaceutiques, lesquelles sont évidemment très intéressées par les profits qu’entraîne la vente des vaccins.
A côté de ce discours revendiquant la validité des arguments opposés à la vaccination, Vaccination Liberation défend des valeurs auxquelles adhèrent bien d’autres mouvements jetant un regard critique sur la marche du monde... L’autonomie, d’abord : il s’agit de « nous libérer d’un abandon de notre pouvoir aux mains d’autorités qui pensent qu’elles savent mieux ce que devraient être nos choix de santé, d’exiger notre pouvoir en tant qu’êtres humains pensants, responsables, autonomes ». Ensuite, une approche globale (holistique) de la santé : il faut « nous libérer de la vision réductrice du modèle bio-médical, nous permettre de construire des manières plus libératrices de comprendre la maladie ; refuser la dissociation des aspects physiques et psychiques de l’être humain, prendre en compte son insertion dans un environnement social et naturel ». Et enfin, l’exercice d’un pouvoir critique : « nous libérer de la croyance aveugle et de l’obéissance » et, cerise sur le gâteau, « nous libérer de la consommation forcée de produits de l’industrie pharmaceutique ».
Tout cela justifie-t-il le refus de la vaccination ? Bien sûr, puisque le vaccin entraîne une cohorte de dangers et effets secondaires ; mais aussi parce qu’il est douloureux de soumettre son corps -et son âme -à des pratiques qui contrarient un certain rapport à soi, au monde, à la vie... Bref, des pratiques qui violent des éléments essentiels sur lesquels ces militants fondent une partie de leur identité.
Tel est le titre d’un article paru récemment dans la revue Education Santé et signé Patrick Trefois, non-fumeur, « plutôt favorable aux réglementations qui (lui) permettent de vivre dans un environnement sans fumée » [3]. « Jusqu’où accepterez-vous d’être désignés à la vindicte collective ? Supporterez-vous donc d’être interdits en tout lieu de vie, d’être regroupés dans des lieux dévolus à l’assouvissement, sous surveillance, de votre ’vice’ ? Et peut-être demain d’être exclus des systèmes de solidarité comme l’assurance maladie invalidité, sous prétexte que vous recherchez sciemment, par votre comportement, les ennuis de santé ? Appréciez-vous d’être traités avec pitié ou condescendance ? Jusqu’à quand supporterez-vous d’être désignés comme des tueurs (via le tabagisme passif que vous imposez aux autres), des inconscients et des suicidaires (vous qui attentez plusieurs fois par jour à votre santé et à votre vie), au mieux des malades incapables de résister à ce poison qui hante vos pensées ? Mais, au fond, êtes-vous encore des citoyens à l’égal des non-fumeurs ? ».
Cet appel vient à l’heure où plusieurs pays ont adopté une stratégie de « dénormalisation » du tabac, conçue au Canada. Comme son nom l’indique, cette stratégie vise à organiser de manière systématique l’adhésion sociale à la norme de santé publique. Deux points clés : d’une part, l’accent mis sur le cynisme de l’industrie du tabac, sous cet angle de vue, le fumeur est « abusé », victime. D’autre part, le risque associé au tabagisme passif : là, le fumeur devient coupable, ou tout au moins complice. Notons que certains fumeurs doutent de l’importance de ce risque, mais ce doute ne semble pas (plus) exprimé sur la place publique...
Le manque de résistance des fumeurs, que déplore Patrick Trefois, vient probablement du fait que la stratégie de dénormalisation a, dans ce domaine, beaucoup d’efficacité sur tout le monde, y compris sur les fumeurs eux-mêmes : même s’ils n’arrivent pas à arrêter de fumer, beaucoup deviennent ambivalents, insatisfaits (c’est un des buts de la dénormalisation), voire honteux. Ils savent en tous cas que le caractère « normal » du tabagisme est définitivement perdu... et qu’ils ne peuvent plus attirer, au mieux, que la commisération - s’ils se conduisent bien.
Ces brèves incursions dans le monde des résistants à la norme incitent à plusieurs réflexions. Y a-t-il des excès, la « résistance » est-elle le fait d’une minorité activiste ? Elle ne doit en tous cas pas être balayée : lorsque les « résistants » racontent leur trajet personnel, on comprend qu’ils ont conquis une pensée, une parole, là où d’autres, plus démunis, subissent l’exclusion dénoncée dans la honte et le repli sur soi.
Tous les résistants évoqués analysent et se positionnent par rapport au savoir scientifique sur lequel s’appuient les stratégies de santé publique. Tous évoquent des controverses qui ont lieu au sein même du monde scientifique et du corps médical. Ceci témoigne du fait que les connaissances évoluent rapidement, qu’il faut du temps avant de réunir des consensus et que de nombreux acteurs interviennent dans la diffusion des connaissances. Les soignants le savent bien, tiraillés qu’ils sont souvent entre leur formation de base, leur expérience clinique, l’EBM*, l’avis d’un éminent spécialiste, les dossiers établis par des firmes pharmaceutiques, les guidelines élaborés par la profession, les stratégies préconisées par le ministère de la santé...
Il n’est donc pas facile pour le profane de s’y retrouver... d’autant qu’internet propose à tout un chacun de se faire un avis sur n’importe quelle question, à partir de sources diversement fiables. Quoi qu’il en soit, la prise de parole des résistants sur le savoir scientifique témoigne d’une volonté des profanes de se réapproprier ce savoir : il ne s’agit pas de le contester de manière obscurantiste, mais bien de partir de ce savoir pour faire reconnaître la légitimité d’une parole autre.
Cette parole autre consiste, pour les sourds, à refuser l’étiquette de handicapés : se voulant maîtres de leur insertion dans un monde spécifique, ils revendiquent en quelque sorte le droit de créer de nouvelles valeurs, de nouvelles normes : ce qui est, comme le rappelle Axel Hoffman (voir l’article Voyage au pays du normal et du pathologique dans ce numéro), une manière dynamique de définir la santé.
Les problématiques évoquées font l’objet d’un discours social autant que médical, allant grosso modo dans le même sens et se renforçant l’un l’autre. Cette convergence qui accentue le sentiment d’être stigmatisé [4], n’est bien sûr pas le fait du hasard : comme le rappelle Axel Hoffman (ibidem), le savoir médical est, aussi, une construction sociale.
La santé publique l’est encore plus clairement, puisqu’elle vise à intervenir au niveau collectif de manière normative, c’est-à-dire en définissant ce vers quoi il faudrait tendre. Ses normes, elle les établit sur base des connaissances issues de l’épidémiologie, qui met en évidence l’exposition particulière de certains groupes à des risques produits par l’environnement et/ou les comportements individuels, lesquels sont eux-mêmes liés à un contexte social. Ces analyses passent, inévitablement, par une catégorisation de publics cibles souvent extérieure à la manière dont se perçoit le sujet.
La tension entre liberté individuelle et bien collectif amène certains à les opposer mais les résistants eux-mêmes ne font pas cette erreur : c’est bien en se regroupant qu’ils espèrent faire entendre leur singularité. Et les obèses identifient des facteurs externes qui renforcent leurs difficultés (marketing des produits alimentaires, faux régimes, pilules miracles...) : ils réclament des mesures réglementaires, ils demandent en quelque sorte plus de santé publique.
C’est ce que fait aussi Patrick Trefois dans l’article déjà cité : « Une autre interrogation me turlupine. Il m’apparaît qu’on a peu légiféré sur le produit de tous les dangers (ndla : le tabac). Pourquoi n’a-t-on pas interdit à l’industrie l’usage de toutes ces substances dont on sait qu’elles sont incorporées au tabac pour accroître son addictivité, ces produits par ailleurs eux-mêmes sources de toxicité ? Bien d’autres exemples nous amèneraient au même doute : face aux pouvoirs économiques, les Etats ne délaisseraient-ils pas leur rôle de protection du ’bien commun’, négligeraient-ils de construire les conditions du possible pour que la santé des citoyens puisse se déployer ? ».
Et il est bien vrai que faute de (pouvoir, ou de vouloir ?) s’attaquer aux producteurs de nuisances et aux conditions sociales qui exposent certains groupes à des risques accrus, le travail de prévention s’appuie souvent sur une « éducation » des publics cibles visant à modifier leurs modes de vie. Education valorisant l’autonomie, la responsabilité, la maîtrise de soi, le développement maximal de ses capacités, l’évitement du risque, dans un monde où, s’il en a la volonté, chacun peut forger son destin personnel : « tout est possible », n’est-ce pas ?
De telles valeurs ont la cote, comme le souligne Christian Léonard, dans un monde dominé par le néo-libéralisme. « Dans ce monde, quelle place reste-t-il pour le citoyen lambda, celui qui ne peut s’identifier à ceux dont on présente une réussite parfois indécente... L’individu responsable n’a finalement pas le choix, il doit se prouver et prouver aux autres qu’il est capable d’utiliser au mieux sa liberté » [5]. Christian Léonard souligne que le concept de responsabilité, sujet à de multiples interprétations, devient « l’instrument par excellence d’une réforme du système de soins » et il souligne les dangers de cette évolution par de multiples exemples.
Reprenons-en quelques-uns dans le champ de la prévention : « Aux USA, dit l’auteur, les entreprises exhortent les travailleurs à faire attention à leur santé, pour enrayer la hausse des coûts, laquelle est répercutée sur le niveau des salaires : dès lors, les travailleurs s’épient l’un l’autre pour détecter les comportements déviants ». « En Grande Bretagne, le Labour a rendu public en 2003 un document où il propose notamment l’établissement d’un contrat de comportement sanitaire correct entre le médecin et son patient : le patient serait ainsi amené à faire du sport, s’alimenter correctement, cesser de fumer et de boire ou tout au moins ne prendre quotidiennement qu’une dose raisonnable d’alcool... Ceci n’a pas (encore ?, ndla) de force légale, c’est un engagement de bonnes intentions ». Ce document est destiné à rappeler au patient qu’il faut utiliser le service de soins publics de manière responsable. En Hollande, depuis janvier 2005, l’assuré bénéficie d’une ristourne s’il adopte un comportement responsable comme consommateur de santé. D’autres exemples similaires concernent le domaine du chômage et de l’aide sociale : il s’agit toujours de responsabiliser, non pas la collectivité, mais l’individu.
Il est bien évident que de telles mesures ne peuvent que creuser les inégalités. Or, toutes les études le montrent, les inégalités sociales face à la santé augmentent, et cela se marque au niveau de la mortalité, de la morbidité, de la qualité de vie, de l’accès aux soins, de l’exposition aux risques. Dans ce contexte, opposer liberté individuelle et bien commun, ou laisser les groupes vulnérables seuls avec leur « liberté » n’a évidemment pas de sens. Mais la difficulté que rencontrent beaucoup d’intervenants, c’est dans l’équilibre à tenir entre le souci de protéger les plus vulnérables et l’étiquetage stigmatisant que peut entraîner leur identification...
Philippe Lecorps, qui n’écrit pas que des poèmes, propose en l’occurrence de distinguer l’éthique et la morale. L’éthique, la responsabilité éthique, « engage l’individu vis-à-vis de lui-même, de l’autre proche et de tous les autres. Elle renvoie aux valeurs qui lui sont propres, même si ces valeurs sont faites d’histoire collective et personnelle. Mais elle renvoie aussi à cette part obscure de l’homme, à son entrée dans la vie, en un mot à son être désirant, fait d’enjeux contradictoires, de paradoxes, de forces contraires, de pulsions de vie et de mort ». Tandis que « la santé publique s’inscrit dans une logique d’ordre social sinon d’ordre moral ». Il est toujours difficile pour les pouvoirs publics d’« arbitrer... entre la liberté du sujet et la nécessaire protection des populations dont ils ont la charge » [6].
En fin de compte, Philippe Lecorps plaide pour un engagement dans la promotion de la santé, ce qui signifie « croire qu’il y a des souffrances et des morts évitables et organiser son action dans deux directions : une démarche politique visant à créer les conditions d’un vivre ensemble plus juste ; une démarche d’accompagnement des sujets singuliers, comme aide à l’élaboration d’un vivre au monde possible ».
Cette démarche nécessite, dit-il, des acteurs de proximité, des acteurs « à qui se fier » ; ce qui ne renvoie pas seulement à leurs compétences et à leurs capacités d’écoute, mais aussi, souligne Alexis Ferrand, [7], à la manière dont ils se situent par rapport aux normes.
Cet auteur évoque deux positions possibles dans lesquelles, tout en se référant aux acquis de l’épidémiologie et aux normes de santé publique, le soignant adopte des attitudes radicalement différentes.
La première attitude revient à délivrer au patient des conseils en donnant à ceux-ci, pour plus d’efficacité, une valeur de norme morale socialement désirable, à laquelle il convient d’adhérer pour être un « bon » patient (responsable, autonome, etc.). Ce message peut être véhiculé de différentes manières : avec autorité, persuasion, en présentant les recommandations comme des évidences auxquelles ne peut que se plier une personne intelligente ; ou encore, plus subtilement, en donnant des marques ténues d’approbation ou de connivence (« Ah, Madame, si on n’avait que des malades comme vous, tout irait mieux... ») ou de désapprobation (« Vous savez pourtant bien que... »). Dans ce type d’interaction, le soignant est normatif dans la mesure où il donne une « sanction » (positive ou négative) au patient. Etant donné le statut inégalitaire des deux partenaires, ce pouvoir de sanction est loin d’être minime... et il fragilise le patient dans ses capacités à élaborer ses doutes, ses difficultés, ses ambivalences, ses choix personnels.
La deuxième attitude consiste à présenter les recommandations comme ce qu’elles sont, c’est-à-dire comme « des informations sur les lois probabilistes des choses de la vie ». Dans ce cas, « les ’sanctions’ qui peuvent survenir en cas de transgression seraient infligées par notre propre organisme, par notre fonctionnement naturel, qui nous ’punirait’ sous la forme de la survenue de telle maladie ou d’une aggravation de notre état de santé. Cette maladie ou cette aggravation ne sont pas des sanctions sociales, positives ou négatives, imposées par les acteurs qui véhiculent ces messages ».
En informant ainsi le patient des risques encourus sans donner une valeur morale à ce qu’il fera de cette information, le soignant engage une relation toute différente : il apporte des connaissances dont il reconnaît les limites, sans imposer au patient une violence normative. Cela nous semble une condition fondamentale pour que s’ouvre un réel dialogue où pourront prendre place la subjectivité, la singularité, et un travail sur ce que Jean-Pierre Lebrun nomme la « normativation » (voir l’article De la perte des repères à l’enfant généralisé, dans ce numéro).
Article paru dans Santé conjuguée - juillet 2007 - n° 41
*EBM : Evidence based medecine, médecine basée sur les preuves.
[1] AERAS : S’Assurer et Emprunter avec un Risque Aggravé de Santé : convention de juin 1994.
[2] Les choses sont évidemment complexes, et dans certains cas, la non-conformité est une qualité : le génie, le champion, le top model,... autant d’exceptions portées aux nues parce qu’elles portent à l’extrême des qualités valorisées dans une culture. Une autre attitude face à celui qui sort de la norme, c’est de lui donner un statut particulier, qui ne gomme pas son étrangeté mais l’apprivoise, la structure pour en neutraliser l’aspect potentiellement dangereux, en faire quelque chose de socialement bénéfique : ainsi le fou devient-il guérisseur dans certaines sociétés....
[3] Patrick Trefois, Fumeurs, réveillez-vous ! Education Santé n° 999, Hors-série.
[4] Cela paraît moins évident pour les « antivaccins », mais ils soulignent que la vaccination étant largement acceptée par la majorité, leur position fait d’eux une minorité souvent disqualifiée par le corps social : les parents qui ne font pas vacciner leur enfant sont jugés obscurantistes et irresponsables tant par les directeurs d’école que par les médecins.
[5] Christian Léonard, « La responsabilisation individuelle : aboutissement de la logique néolibérale et de l’individualisme », Education Santé n°999, Hors-série.
[6] Philippe Lecorps, « Ethique et morale en promotion de la santé », Education Santé n° 999, Hors série
[7] « La tension normative : un état à la fois personnel et interpersonnel », in Actes de la Journée d’Etudes du Comité de recherche 13, Sociologie de la santé de l’AISLF, Normes et valeurs dans le champ de la santé, Université de Bretagne Occidentale, Brest, mars 2003.
Tous les trois mois, un dossier thématique et des pages « actualités » consacrés à des questions de politique de santé et d’éthique, à des analyses, débats, interviews, récits d’expériences...