Dans le contexte des élections européennes, fédérales et régionales, nous invitons à une attention particulière aux politiques qui s’inscrivent dans l’objectif de réduction des écarts de revenus.
Cette vigilance ne doit pas prendre fin avec les élections. Nous serons également attentif/ve/s aux déclarations de politique générale des exécutifs qui en sortiront, et à leur évaluation dans la durée. Les gouvernements ont le pouvoir d’influencer les écarts de revenus. La crise économique actuelle ne doit pas l’empêcher. Au contraire, l’avènement de l’égalité est une solution durable pour sortir de la crise. Diminuer les écarts de revenus passe tant par la redistribution des richesses que par la maîtrise sur les écarts de revenus à la base. C’est pourquoi nous retenons particulièrement et entre autres, des enjeux liés à la fiscalité et à la sécurité sociale.
Actuellement, les revenus du travail sont plus taxés que ceux du capital. Les salaires sont taxés de façon progressive, tandis que les dividendes des actionnaires le sont de manière forfaitaire. Les plus-values boursières, elles, sont totalement détaxées en Belgique. Ces logiques fiscales favorisent les revenus les plus élevés, dont les ressources financières principales sont en-dehors des revenus du travail.
Globaliser les revenus en intégrant ceux du travail et du capital et les taxer via un système d’imposition plus progressif réduirait l’écart entre les revenus. Bien entendu, cette attention à la manière de récolter l’impôt ne suffit pas, et s’accompagne d’une vigilance sur son utilisation, qui doit être tout aussi équitable.
En 2010, le seuil de pauvreté européen selon la définition de l’union européenne (soit 60 % du revenu médian) a atteint, pour la Belgique, 1 000 euros par mois pour une personne isolée et 2 101 euros par mois pour un ménage composé de deux adultes et deux enfants [1].
La plupart des montants des minima sociaux se situent sous ces seuils de pauvreté. Un travail à temps plein rémunéré au salaire minimum ne permet pas non plus toujours de vivre au-dessus du seuil de pauvreté. Cela dépend de la composition du ménage. Les indicateurs de déprivation matérielle mettent en évidence la réalité des différences de niveaux de vie.
Amener immédiatement les revenus minima professionnels au-dessus du seuil de pauvreté est une mesure indispensable, mais insuffisante. Pour agir réellement sur les écarts de revenus, il est indispensable de mettre en place une série de mécanismes de correction : programmation pluriannuelle de l’indexation, calcul du seuil de pauvreté sur la base du PNB prévu pour l’année à venir (et non sur le PNB calculé a posteriori), définition d’une norme de rattrapage planifié des écarts, etc… Sans quoi le relèvement au-dessus du seuil de pauvreté constituerait, au mieux, une stabilisation des inégalités actuelles.
L’évolution de l’index étant au centre de ces dispositifs, il est impératif de revoir sa composition, pour y donner la plus grande place aux biens de consommation courante répondant aux besoins fondamentaux, biens qui composent l’essentiel du panier de consommation des plus bas revenus.
Actuellement, le droit à la sécurité sociale est appliqué de manière inégale. Pour certains bénéficiaires, il est lié au mode de vie et à leurs charges familiales. Au fait d’être, par exemple, isolé ou cohabitant. Ce qui entraîne, pour certains assurés sociaux, une diminution de leurs revenus. Ainsi l’allocation de chômage due à une personne qui a le statut de cohabitant est moindre que celle due à une personne qui a le statut d’isolé. La référence au mode de vie est au cœur du système de la sécurité sociale.
La nécessité de l’individualisation des droits en sécurité sociale repose d’abord sur des exigences d’égalité. Elle concerne les droits directs ou droits propres, mais aussi les droits dérivés. Cet accès aux droits dérivés est inégal. Remettre en cause l’existence de droits dérivés peut permettre à des assurés sociaux de voir leurs revenus augmenter et de parvenir à plus d’égalité, à condition que cette mesure soit liée aux précédentes, à savoir l’augmentation des revenus minima et une fiscalité juste.
Plus concrètement, la suppression du statut de cohabitant fait partie des réponses à apporter aux inégalités de revenus.
Même si la construction européenne reste avant tout au service du profit, ou justement pour cette raison, toutes ces politiques ne pourraient prendre sens que dans le cadre d’une Europe sociale. La première condition pour la réaliser est une harmonisation fiscale européenne, pour mettre fin à la concurrence fiscale entre entreprises européennes, qui favorise une logique de guerre des revenus.
En parallèle, il est indispensable de s’engager concrètement sur la voie d’une harmonisation des politiques salariales au niveau européen, en visant l’égalisation vers le haut, notamment celle des salaires minima.
« C’est une question de choix : agir pour plus de bien-être pour tous les citoyens passe par la remise en cause des inégalités économiques, par la diminution des écarts de revenus et par une meilleure redistribution des richesses. Travailler à faire advenir plus d’égalité au niveau des revenus permettra de diminuer nombres de problèmes sanitaires et sociaux au bénéfice de tous les membres d’une même société. De plus, plus d’égalité amène des améliorations de santé et sociales plus importantes chez les citoyens qui vivent dans la pauvreté que chez ceux qui vivent dans la richesse. L’égalité devient « une espèce de bien commun qui profite à tous »
- Wilkinson R & Pickett K (2013). Pourquoi l’égalité est meilleure pour tous. - Les petits matins/Institut Veblen/ Etopia.
Dans le contexte des élections européennes, fédérales et régionales, le réseau pour l’égalité invite à une attention particulière aux politiques qui s’inscrivent dans l’objectif de réduction des écarts de revenus.