À Bruxelles, un rapport du Centre d’expertise a été présenté le mercredi 10 septembre sur l’évaluation du système du paiement forfaitaire comparé au paiement à l’acte en médecine générale. Ce rapport est le résultat de trois ans de recherche et a abouti à des conclusions très pertinentes, non seulement pour la Belgique, mais aussi au niveau international.
Depuis 1984, en Belgique, plusieurs centres de santé et maisons médicales fonctionnent dans le cadre du paiement forfaitaire et non à l’acte. L’an prochain, 2 % de la population belge sera soignée dans le système forfaitaire. Dans un tel centre de santé, les patients doivent s’inscrire, ils peuvent bénéficier des soins des généralistes, infirmiers, et kinésithérapeutes de cette pratique et ne déboursent aucune contribution personnelle (le ticket modérateur). Le centre de santé s’engage à délivrer des soins curatifs et préventifs de qualité, accessibles.
Le Centre d’expertise a fait une enquête détaillée pour comparer le système de paiement forfaitaire et le système de paiement à l’acte et ceci dans le domaine de l’accessibilité, de la qualité et de l’efficience des soins.
Dans le domaine de l’accessibilité, les chercheurs constatent que les centres de santé soignent les groupes les plus vulnérables de la société. Les chercheurs ont veillé à composer un groupe comparable de patients dans la médecine à l’acte, mais difficilement : il est apparu que dans le groupe qui consulte dans les centres de santé, il y a plus de gens vulnérables (plus de bénéficiaires du minimum de d’existence, d’invalides,...).
La littérature internationale nous apprend que les gens financièrement vulnérables sont aussi davantage malades et nécessitent plus de soins. Il faut encore remarquer que le Centre d’expertise n’a pas poussé la recherche vers les soins aux personnes sans papiers : de ce côté aussi, les centres de santé jouent, certainement dans les grandes villes, un rôle important.
On constate de plus que les patients des centres de santé utilisent moins de soins spécialisés et hospitaliers que les patients qui sont soignés dans le système à l’acte.
Dans le domaine de la qualité, beaucoup d’indicateurs de qualité ont été examinés. Pour aucun indicateur, les centres forfaitaires ne font plus mal que leurs pairs à la prestation. Lorsqu’une différence existe, c’est en faveur des centres de santé, et ceci surtout dans le domaine des soins préventifs (vaccination et dépistage). En matière de prescription de médicaments, on observe que les centres de santé prescrivent mieux (par exemple dans le domaine des antibiotiques) et tiennent compte des prix.
Ceci nous conduit naturellement à l’efficience.
Les centres de santé reçoivent un financement qui est calculé sur la consommation moyenne belge en médecine à l’acte, augmenté de 31 % et ceci pour la médecine générale, la kinésithérapie et les soins infirmiers.
Cette correction est motivée pour tenir compte de :
• des non-utilisateurs structurels de la première ligne ;
• la surreprésentation des populations fragilisées, avec besoins accrus dans la patientèle des Vereniging Van Wijkgezondheidscentra/maisons médicales ;
• et enfin la démonstration des économies réalisées.
Ce « sur-financement » est largement compensé par le fait que les patients qui sont soignés dans le système forfaitaire font moins usage de soins spécialisés et hospitaliers (sauf pour les affections psychiatriques), subissent moins d’examens techniques, de laboratoire, d’imagerie médicale et enfin moins de frais en matière de médicaments.
Ces résultats sont également intéressants au plan international : on trouve classiquement dans la littérature internationale que, avec le paiement forfaitaire, il existe un danger de sélection des risque (les plus malades et vulnérables trouvent difficilement l’accès au système), de référence excessive à la deuxième ligne (pour diminuer la charge de travail en première ligne), et la conclusion plus fréquente d’une consultation par une prescription de médicaments.
Mais la recherche a montré des résultats variables en fonction du pays où se faisait l’analyse.
Aucun de ces effets pervers signalés par la littérature internationale n’est observé dans le forfait en Belgique. Au contraire, le système est plus accessible, il y a moins d’utilisation de la deuxième ligne, moins de médicaments sont prescrits.
La conclusion du rapport du Centre est donc qu’il « est opportun d’encourager le développement du système forfaitaire » (page 154).
De plus, à côté du coût public, il faut tenir compte du coût pour les patients, alors la conclusion serait encore bien plus évidente. Les économies de ticket modérateur en première ligne (quasi inexistant au forfait) et en deuxième ligne (par moindre utilisation) donneraient une économie pour les citoyens qu’on peut estimer sans danger supérieure à 10 % du coût moyen.
Les centres forfaitaires en Flandre, en Wallonie et à Bruxelles ne peuvent que se rallier à cette conclusion et demandent un financement équitable, en se basant sur l’utilité sociale démontrée par les centres de santé sur le terrain. Aujourd’hui encore, le financement des centres forfaitaires est calculé sur la moyenne des frais dans la médecine à l’acte.
De ce rapport, il ressort clairement que les centres forfaitaires soignent une population différente, et aussi fournis- sent une offre de soins de qualité. Ceci signifie qu’il faut rechercher d’autres mécanismes de financement.
Les maisons médicales et les Wijk- gezondheidcentra pensent qu’ils offrent un modèle alternatif de santé à part entière et qu’une plus large population devrait y avoir accès.
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