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Promotion de la santé

Pour un partenariat avec la médecine générale en promotion de la santé


janvier 2008, Bénédicte Hanot

coordinatrice des projets à la maison médicale des Marolles.

, Morelle Véronique

médecin généraliste à la maison médicale des Marolles

L’équipe de la maison médicale des Marolles s’est penchée sur ses perceptions et sa pratique en matière promotion de la santé et en a tiré des pistes de collaboration entre équipe pluridisciplinaire et médecine générale. Et ce dans le cadre de réponses à apporter à un questionnaire préparatoire à la construction d’un partenariat construit par la jeune asbl Promotion santé et médecine générale dont les associations fondatrices sont la Société scientifique de médecine générale (SSMG) et la Fédération des maisons médicales.

Comment voit-on l’existence et le développement de la promotion de la santé en médecine générale ?

Pour nous, la promotion de la santé fait partie de la fonction du médecin généraliste. Mais bien souvent, c’est une fonction qu’il exerce de manière implicite. Donc le premier « travail » sera d’en prendre conscience. Et aussi de prendre conscience qu’en travaillant en équipe, on peut faire plus de promotion de la santé.

En maison médicale, c’est un réel avantage d’être une équipe pluridisciplinaire, donc de pouvoir s’adjoindre la collaboration de compétences différentes, ce qui amène un enrichissement de chaque discipline par la confrontation des unes aux autres. Cela permet à la médecine générale de « sortir du cabinet », de s’articuler avec d’autres sphères, d’adopter d’autres objectifs que l’acte pur de soigner.

Pour le dire autrement, en équipe on peut travailler des objectifs communs tels que :

• placer les questions de santé dans le cadre du quartier : que faudrait-il mettre en place pour que le patient soit aidé, pour favoriser la qualité de vie, pour améliorer les déterminants de la santé, quels services, activités ou aménagements développer, quelles orientations politiques adopter… Aux Marolles, ce questionnement et les réponses que nous y avons apportées se sont concrétisés par diverses initiatives : groupe cuisine, groupe marche, Toile de Jeux, groupes de parole...

• penser les objectifs de participation et d’autonomie du patient au sein institutionnel de la maison médicale et donner une existence concrète à cette philosophie. Par exemple à l’accueil, comment responsabilise-t-on le patient au moment de l’inscription ou de la prise de rendez- vous ? (papier explicatif écrit, …).

• favoriser l’ouverture des médecins, faire en sorte que le médecin reconnaisse le travail politique, d’animation, d’éducation et d’écoute comme faisant aussi partie de son travail ou s’articulant avec son travail et le complétant.

• avoir une globalité dans l’approche.

• créer des liens, créer des réseaux de santé incluant l’approche globale, c’est-à-dire une approche pas exclusivement limitée aux soins, mais visant la santé au sens plus large. C’est dans cette optique que la maison est partenaire actif dans le Réseau diabète et le Réseau santé mentale.

Que peut-on apporter à la médecine générale pour initier ou consolider des stratégies, des principes, des valeurs, des actions en promotion de la santé ?

Il y a une série d’étapes intermédiaires avant d’arriver à celui du changement de comportement.

En tant qu’acteur de promotion de santé, on est attentifs à souligner les apports d’un meilleur épanouissement des personnes sur leur santé physique. Egalement à mettre en avant la parole des personnes, leurs craintes, leurs représentations, leurs questions, identifier en quoi c’est difficile de suivre un traitement et quels sont les freins, les leviers sur lesquels on peut agir. On cherche à obtenir une meilleure connaissance du contexte de vie des gens, de leurs aspirations, de leur culture et de leurs habitudes, pour mieux adapter les actions. Prenons l’exemple de l’alimentation et de la diététique dans la culture maghrébine : il est essentiel de tenir compte de l’aspect social car, par exemple, leur habitude est de manger dans le même plat. Essentiel aussi est de connaître ce que cette culture imprime quant à ce qu’il en est du goût et du plaisir dans l’alimentation. La dimension psychologique n’est pas à oublier : il ne suffit pas de connaître les principes diététiques, ce qui est important c’est d’apprendre en plus à gérer les écarts (et donc d’être autorisé à faire des écarts).

L’écoute des personnes est primordiale. Leur laisser le temps et la place pour qu’elles osent parler d’elles-mêmes, par exemple du fait qu’elles ne veulent pas arrêter de fumer. Il est important aussi d’accepter que le patient ait une autre définition que nous de la santé, de la « qualité de vie », de sa vie.

Le promoteur de santé peut amener des réflexions, des expériences, un contact avec les patients en dehors du cadre soignant (il les voit comme habitants), il peut proposer d’autres grilles de lecture, par exemple au niveau culture.

Quelques idées concrètes :

• Créer des postes de « promoteur santé » volant dans les différentes salles d’attente des médecins généralistes isolés. Que le médecin généraliste isolé soit connu comme acteur par les autres intervenants et qu’il puisse de ce fait aussi être appelé par le quartier comme référence.

• Proposer des Groupes locaux d’évaluation de la médecine (GLEMs) sur le thème de la promotion de la santé avec outils, techniques, réflexions,

Qu’est-ce que la médecine générale peut apporter à nos projets en promotion de la santé ?

Une bonne connaissance de la maladie. A la fois pour bien comprendre le comment ça se passe, les causes, les conséquences ; ceci pour mieux mettre en évidence les déterminants. Et à la fois pour pouvoir expliquer aux gens, répondre à leurs questions, les rassurer.

Elle permet de disposer d’un repère épidémiologique, de situer de quoi souffrent les gens, donc de mieux connaître sa patientèle, les caractéristiques de sa population.

La médecine générale peut aussi faire part de la nature des tracas qui se disent en cabinet, elle peut faire le lien entre curatif, préventif et communautaire car en cultivant le lien privilégié avec le patient le médecin peut amener ce dernier à une activité collective ou de bien-être.

Quelles difficultés potentielles peut-on identifier pour le développement de la promotion de la santé en médecine générale ?

Elles sont nombreuses !

• Le temps des médecins, le temps de consultation, où parfois le médecin ne s’autorise pas à sortir du cadre et à discuter avec le patient de ses projets de vie, …

• La logique des médecins : répondre à la demande ou au symptôme correspond à un rythme de travail très différent de celui plus réflexif et à long terme de la promotion de la santé.

• Une trop grande rapidité dans un diagnostic socio-psycho-comportemental fait qu’on se trompe de problèmes. Par exemple, on pense qu’un patient a besoin de médicaments alors qu’il a besoin de contacts sociaux, ou qu’un patient a besoin d’une diététicienne alors qu’il aurait plutôt besoin d’un soutien psychologique. L’erreur est de ne pas donner la parole au patient, ne pas lui demander son avis.

• La croyance, pas encore assez combattue, que la promotion de la santé est une perte de temps.

• Le manque d’outils méthodologiques ou pédagogiques, de grilles de lecture, de communication, …

• La complexité de la politique : savoir à qui s’adresser (huit ministres ont un bout de champ de santé dans leurs compétences !).

•L’absence d’interlocuteur : il faut disposer de relais de proximité (au niveau communal) pour que, dans le cadre de la promotion de la santé, le médecin puisse être efficace comme acteur social.

• Une meilleure reconnaissance et une valorisation de la fonction du médecin généraliste auprès des politiques permettrait un meilleur développement de la promotion de la santé en médecine générale.

Quelles interrogations, craintes, réserves, doutes peut-on exprimer envers les généralistes qui s’intéressent au développement de la promotion de la santé ?

Dans l’état actuel, il faut oser poser la question : est-il possible de faire de la promotion de la santé quand on travaille en solo ? La réponse n’est pas forcément négative, ainsi que l’a montré notre expérience d’observatoire logement et santé, mais il faut pouvoir réunir les médecins généralistes, connaître ses limites d’intervention et savoir relayer.

Quels rêves, souhaits, espoirs, bonheurs peut-on formuler pour de pareils projets ?

Des moyens financiers plus durables ! Plus de temps ! Plus concrètement, il faudrait développer un travail en réseau entre maisons médicales, renforcer l’usage du Dossier médical global. Et surtout changer de raisonnement, ne plus centrer la prise en charge sur le côté médical mais sur le patient.

Quelles seraient les premières étapes à mettre en place pour réussir le démarrage d’un partenariat entre les associations de promotion santé et la médecine générale ?

• Créer des liens, des réseaux.

• Apprendre à partager le travail et les compétences, se mettre à l’écoute des autres disciplines.

•Pour les médecins isolés, trouver des moyens financiers pour leur permettre de réaliser un tel travail.

• Instaurer très tôt dans la formation de base des médecins l’approche en promotion de la santé.

• Faire connaître aux médecins (et aux étudiants en médecine), au minimum, les Centres locaux de promotion de la santé et les associations de médecins. Susciter des collaborations, … Mais sans prendre le médecin généraliste pour un « demi- demeuré » !

Cet article est paru dans la revue:

n° 43 - janvier 2008

Les violences liées au sexe

Santé conjuguée

Tous les trois mois, un dossier thématique et des pages « actualités » consacrés à des questions de politique de santé et d’éthique, à des analyses, débats, interviews, récits d’expériences...