Les migrants et certains groupes ethniques sont régulièrement cités comme groupes vulnérables, que ce soit en termes de différence d’état de santé ou dans l’accès aux soins. Sur base d’un constat européen, la Commission Européenne cofinance actuellement le projet EUGATE afin d’identifier les bonnes pratiques en santé des migrants, projet dont une équipe de chercheurs de l’UCL s’est chargé en Belgique. Premiers résultats et premières pistes d’action.
Développé dans 16 pays européens, le projet EUGATE a pour objectif d’identifier les bonnes pratiques permettant d’améliorer l’accès aux soins et l’état de santé des populations migrantes [1]. Ce projet s’articule autour de trois méthodes de recherche complémentaires : analyse de la législation et des politiques de santé publique (ex : plan communautaire opérationnel), entretiens qualitatifs et processus Delphi. Les entretiens qualitatifs ont été réalisés auprès de professionnels de la santé travaillant avec des populations migrantes au travers de trois types de services : services de soins de santé primaires (médecins généralistes, maisons médicales,…), services de santé mentale et services d’urgences. Les services sélectionnés sont tous situés en région bruxelloise [2] dans les trois communes présentant une population étrangère non européenne élevée [3], soit Schaerbeek, Saint-Josse et Molenbeek. Au total, 15 entretiens ont été réalisés. Le processus Delphi est une méthode de consensus entre experts. L’objectif est d’arriver à un consensus sur ce qui « constitue un facteur de bonne pratique en santé des migrants ». 11 experts francophones et néerlandophones ont été retenus. Ils ont été choisis parmi le monde académique, les organisations non gouvernementales, les instances publiques ou les travailleurs de terrain comme des médecins généralistes. Ces experts ont rédigé et approuvé une liste de 10 facteurs reconnus, par consensus, comme des éléments de bonne pratique en matière de santé et d’accès aux soins des migrants. Au vu de la diversité des résultats obtenus, seuls les principaux thèmes du processus Delphi et des entretiens qualitatifs feront l’objet de cet article : langue, culture et aide médicale urgente.
Le problème le plus fréquent, à travers les trois types de services, concerne la communication : les patients ont encore trop souvent une connaissance insuffisante voire nulle de la langue de leur soignant, que ce soit le néerlandais ou le français.
Et tu as un peu peur d’expliquer 25 fois au risque de les prendre pour des cons, parce que c’est pas parce qu’ils ne parlent pas français qu’ils sont bêtes, mais tu ne sais pas jusqu’où tu dois expliquer. Parfois, les gens ils ne te disent pas qu’ils n’ont pas compris. Une fois, il y avait un jeune avec un accent de la banlieue et je lui explique et apparemment, il n’était pas habitué à un langage comme chez nous, avec du vocabulaire, et donc je lui explique un truc, c’était un gars de 16 ans, je lui pose une question et il me fait : « j’ai rien compris ». Bon, je lui ai ré-expliqué mais finalement je ne pense pas qu’il ait compris ce que je lui ai expliqué (Service de soins de santé primaire).
Le problème de la différence de langue est souvent résolu par le recours aux interprètes formels et informels. L’interprétariat formel est perçu comme un service de qualité mais est présenté comme difficile à obtenir - car faute de moyens financiers ou par cause de longs délais d’attente - et ne fournissant pas toutes les langues. Il sera préférentiellement utilisé pour des rendez-vous programmés, par exemple pour une consultation de suivi du diabète ou d’un problème psychologique. Dans la pratique usuelle, cette problématique est donc essentiellement gérée en interne, soit via les compétences personnelles des membres de l’équipe de soins, soit via la famille et/ou les amis voire un autre patient ou encore une personne totalement extérieure au service (commerçant, nettoyeur,…). En outre, cette solution est ambivalente car la présence d’un traducteur, professionnel ou non, peut interférer, consciemment ou inconsciemment, avec la relation thérapeutique.
Je trouve qu’il y a pas mal la barrière de la langue et, aussi, quand c’est une personne de la famille qui vient traduire, elle traduit ce qu’elle veut, ce n’est que de l’interprétation. On sent vite quand la personne qui traduit, traduit vraiment ce que tu dis ou quand il y a aussi une volonté d’euxmêmes de faire une analyse d’urine alors ils vont dire : « ah oui, mais là tu as fait pipi » alors que ce n’est pas vrai. (Service de Soins de Santé Primaire).
Certains professionnels reconnaissent recourir aux services des enfants, tout en nuançant leur utilisation en fonction du contexte de la consultation. Les difficultés de communication, essentiellement dans l’urgence, font qu’il n’est pas toujours possible d’éviter cette situation. En pratique, une partie des professionnels suggère d’accepter la présence de l’enfant-interprète lors de la première consultation mais d’inviter l’enfant et son parent à proposer un autre traducteur pour le rendez-vous suivant.
Les difficultés de communication entre soignants et soignés ne sont pas seulement liées à un problème de langue mais également de culture. Les différences culturelles s’expriment à travers diverses composantes : modes d’expression et facteurs explicatifs des maladies, représentations de la santé, compréhension par les professionnels et validité transculturelle des diagnostics. La validité transculturelle des diagnostics suscite des questions, notamment en santé mentale. Notre vision « occidentale » de la maladie est-elle toujours en adéquation avec la manifestation des symptômes du patient ?
Enfin moi je reste toujours avec des freins quand il s’agit de diagnostics, qui sont nos diagnostics à nous. Avant de vouloir les mettre, je pense que je serais avec des questions à lui poser. Parce que c’est notre vision à nous quand on parle de troubles bipolaires, à part l’épisode maniaque, c’est confondre hystérie et crise de possession, c’est assez fréquent. (Service de Santé Mentale).
Certains migrants peuvent être plus expressifs dans leur symptomatologie : pleurs abondants, cris, agitation… Ces comportements, liés en partie à l’appropriation culturelle de la maladie, peuvent déranger certains soignants et certains autres patients. Dans la même lignée, le refus de se faire soigner par un praticien du sexe opposé peut être lié à des normes culturelles. Si l’Ordre des Médecins a été clair en rappelant qu’il n’y a pas de choix du médecin en cas d’urgence [4], la problématique se pose régulièrement lors de la pratique courante. Chaque structure possède sa propre ligne directrice tout en essayant de trouver un juste milieu entre les désirs du patient et les possibilités du service.
Ou bien il y a une urgence grave et donc, ici en disant une prééclampsie, nous ne faisons pas de distinguo entre hommes et femmes, et donc là, si on est dans des pathologies graves, les patientes utilisent le gynécologue qu’il y a sur place. On ne va pas faire venir des gens. On a des gens compétents, que les patients se soumettent à la règle ou pas. Ça, c’est clair. Maintenant, si les faits ne sont pas graves, on leur recommande de prendre rendez-vous avec un gynécologue de leur choix, c’est vite réglé ça. (Service d’Urgences).
Si ces barrières culturelles s’ajoutent à d’autres facteurs comme le manque de temps ou l’effort cognitif demandé au soignant dans un délai relativement court [5], il n’est pas rare de déboucher sur des relations agressives entre soignants et soignés. Certains soignants reconnaissent un certain a priori à prendre en charge des patients immigrés par cause d’antécédents conflictuels. Patients et soignants peuvent projeter des stéréotypes les uns sur les autres, qui renforcent ces barrières.
Par ailleurs, le recours à un praticien de même culture n’est pas spécialement encouragé dans le sens où si être de la même culture peut s’avérer parfois bénéfique, cela peut également être délétère pour des raisons culturelles mais également historiques et politiques (conflits entre deux ethnies, peur de choquer un psychologue d’une même culture avec des propos différents sur des valeurs culturellement communes). Même attitude lors du recours aux associations d’aide aux réfugiés. Appartenir à la communauté du patient n’est pas un bouclier dans les situations difficiles, les soignants immigrés peuvent également vivre des situations conflictuelles.
De plus, les soignants remarquent régulièrement que les demandes de soins sont accompagnées de demandes sociales face auxquelles ils ne sont pas toujours armés pour répondre. Diverses solutions sont apportées face aux barrières culturelles, notamment via le rôle essentiel des médiateurs interculturels et des services sociaux. Recommandés par les experts belges et internationaux (Verrept 2008 ; Nierkens et al. 2002), les médiateurs sont également considérés comme une bonne pratique par les soignants y ayant recours, même si leur utilisation n’est pas encore totalement efficiente (Verrept, 2008). Les médiateurs étant essentiellement présents dans les hôpitaux, les services de soins de santé primaire comptent beaucoup sur la diversité de leurs équipes pour faire face aux problèmes liés à la culture. Ils s’appuient également sur les compétences personnelles et professionnelles des soignants (formation en médecine tropicale, expériences à l’étranger, formation en ethnopsychiatrie…). Une approche complémentaire à la médiation, souhaitée par certains professionnels, passe par un renforcement de la formation du personnel sociosanitaire, soit via les programmes de formation continue, soit via des animations adaptées au terrain dispensées par quelques asbl (par exemple Culture et Santé). Enfin, soulignons l’initiative d’une maison médicale qui a réalisé un travail anthropologique avec un spécialiste afin de mieux connaitre ses patients. Durant plusieurs années, un ethno-anthropologue, spécialiste de la culture turque, a accompagné l’équipe dans ses réunions pour apporter un nouvel éclairage sur certaines situations vécues par les soignants avec leurs patients. Même si une attention doit être accordée aux différences culturelles, les participants rappellent qu’ils soignent d’abord des individus et non des « étrangers ». La création de services spécifiques pour « migrants » n’est jamais ressortie dans les différentes interviews. Au contraire, l’accent est mis sur un travail en réseau, avec des structures interdisciplinaires même si certains reconnaissent connaître insuffisamment leurs partenaires potentiels dans le domaine de la santé et du social.
Le manque de connaissance du rôle des services et de l’organisation du système de soins de santé est à l’origine d’une série de problèmes : utilisation abusive des urgences, anxiété liée à l’incompréhension du système de soins, difficultés de suivis… Si cette problématique est souvent citée en regard des migrants, elle ne leur est pas spécifique. En effet, certains professionnels reconnaissent avoir eux-mêmes des difficultés à comprendre le système belge d’aide aux demandeurs d’asile et sans-papiers, notamment la procédure d’aide médicale urgente (AMU). En théorie, la procédure d’aide médicale urgente est une bonne pratique : la personne nécessiteuse peut bénéficier de soins préventifs et curatifs, en ambulatoire ou en hospitalier. En pratique, la procédure apparait comme bancale aux yeux des professionnels. Si l’AMU est une disposition fédérale, l’organisation de l’aide sociale est une compétence des communes, via les CPAS. Les communes disposent d’un pouvoir de décision autonome quant à la manière dont l’aide sociale et l’AMU sont gérées. Dès lors, les CPAS peuvent organiser l’AMU sous la forme de leur choix : carte médicale, réquisitoires à l’acte, etc. Les soins pris en charge peuvent également connaitre des variations d’une commune à l’autre. Le flou entourant la définition de l’AMU [6] concourt à renforcer la disparité entre communes. De même, les professionnels de la santé n’ont pas la même vision du soin que les CPAS. Les prises en charge demandées par les soignants ne sont pas toujours accordées par les CPAS, ce qui conduit certains médecins généralistes à retarder le transfert du patient en assumant la majeure partie de la prise en charge et ce y compris lorsque des examens complémentaires sont nécessaires. Cette situation est vécue comme néfaste par les professionnels, à la fois pour la qualité des prises en charge, mais également pour la santé des patients. Ces derniers sont en situation précaire de par leur statut, auquel s’ajoutent les incertitudes liées à la prise en charge par l’AMU. De plus, bien que dans l’arrêté royal relatif à l’AMU [7] aucune restriction n’est émise quant au lieu de soins, ces patients sont orientés préférentiellement vers quelques services ou hôpitaux par certains soignants et services sociaux. Cette pratique est soit dictée par la facilité pour le praticien, soit liée à l’incertitude quant à la prise en charge financière des coûts des soins. Il est clair que s’il s’avère que le patient doit être opéré en urgence par exemple et qu’il n’a pas les moyens et bien à ce moment-là, on va le transférer dans un service dans le réseau IRIS. Donc un service qui sait qu’il y a une prise en charge par le CPAS.
Moi je pense que moi un patient comme ça, [NDLR : un patient illégal avec douleurs abdominales et fièvre] je l’envoie directement aux urgences. C’est plus facile pour moi qu’un patient belge. C’est plus facile pour moi d’envoyer ce patient-là aux urgences où je sais qu’aux urgences, il aura tout d’un coup et un diagnostic etc.
Enfin, la procédure d’AMU est vécue comme une charge administrative importante pour les médecins et les hôpitaux. Certains prestataires vont même jusqu’à « offrir » la consultation à certains patients illégaux pour ne pas devoir remplir les papiers nécessaires aux remboursements. Dès lors, certains professionnels demandent un meilleur soutien administratif dans les diverses démarches, notamment pour l’obtention de l’AMU. C’est particulièrement nécessaire pour des médecins généralistes travaillant seuls, assumant à la fois la partie médicale et administrative de la prise en charge. Les maisons médicales et les services de santé mentale reconnaissent l’importance d’avoir un accueil de qualité, gérant en partie les démarches administratives même si ces dernières occupent toujours une partie du temps de consultation. Le fond Impulseo II a permis de réduire une partie du travail administratif sans tout résoudre pour certains médecins.
Mais tout seul, ce n’est pas évident. On dit, quand on voit des personnes, donc, en ordre de papiers, ce n’est pas grave, on est, quand je vois des personnes sans papiers, parfois j’ai la tendance de dire, allez à la polyclinique en face, ça va être plus facile pour la prise en charge, parce que moi, ce n’est pas évident de téléphoner pendant la journée, on n’a pas de réponse, c’est occupé, on téléphone, parfois, mercredi je laisse, mercredi, ce n’est plus sur rendez-vous, mercredi je m’occupe parfois toute une matinée pour un patient ou pour deux patients. Et c’est très lourd. (Service de soins de santé primaire)
Ce soutien administratif doit aller de pair avec une harmonisation des procédures d’octroi de l’AMU, pour autant que cela ne se fasse pas au détriment de la liberté thérapeutique des prestataires et de la qualité des prises en charge. Une partie des professionnels est intéressée à mieux comprendre le fonctionnement du système de santé, ce qui bénéficierait également aux patients belges. Des initiatives comme les brochures d’informations sur l’AMU éditées par l’ASBL MedImmigrant s’avèrent être des bonnes pratiques à soutenir et à développer.
Les principaux obstacles de l’accès aux soins demeurent les barrières de la langue et de la culture pour la majorité de la population migrante, indépendamment de son statut de séjour sur le territoire belge. L’apport des médiateurs culturels est indispensable, tout comme un renforcement des connaissances des soignants en matière d’interculturalité. Ces mesures doivent faire l’objet d’une approche intégrée dans le système de santé actuel. La présence du médiateur interculturel ou des « health advocates » est un facteur permettant de diminuer les barrières entre soignants et patients (Verrept, 2008 ; Harmsen, 2008 ; Schouten, 2005 ; Nierkens et al. 2002). D’autant que l’augmentation de la durée de séjour dans un pays ne réduit pas la nécessité de recourir à un médiateur interculturel (Nierkens et al, 2002). Les médiateurs interculturels ne doivent pas être vus comme des intervenants provisoires mais, au contraire, comme des acteurs à part entière dans la dynamique des soins. Le manque de ressources des structures pour engager des médiateurs et/ou former son personnel à l’interculturel est un obstacle à la réduction des barrières linguistiques. Par ailleurs, la procédure d’aide médicale urgente souffre encore d’un manque de clarté dans son application, conduisant à une disparité dans les prises en charge et à une augmentation des inégalités entre les personnes. Une harmonisation administrative couplée avec un soutien logistique et financier des professionnels de soins est la mesure qui, actuellement, permettra d’assurer un meilleur accès aux soins pour les patients bénéficiaires de l’AMU. En effet, 98,2% (N=112) des personnes remplissent les conditions pour y avoir accès selon des chiffres de 2009 de l’Observatoire de l’Accès aux Soins de Médecins du Monde. Par contre, en pratique, seuls 10% des personnes bénéficient d’une prise en charge effective ! Les obstacles identifiés sont consistants avec ceux relevés par EUGATE mais également PICUM (2002) : lourdeur des démarches administratives, méconnaissance de la procédure et de la langue. En regard de ces constats, les experts belges du processus Delphi s’accordent pour souligner le besoin de formation des professionnels de la santé et du social, y compris dans les cursus de base. Face aux barrières linguistiques, le groupe d’experts Delphi, tout en recommandant l’intégration des interprètes dans les services, insiste également sur la présence de soignants parlant différentes langues ou de soignants venant d’autres cultures dans les services de soins (pas seulement au niveau des structures d’intendance et de maintenance des services). Cela nécessite préalablement un renforcement du travail en équipe et une meilleure intégration des ressources des réseaux existants. Certains pays, à l’instar du Royaume-Uni, intègrent les associations de migrants dans le réseau de soins et organisent des tables rondes entre les différents acteurs de la santé, qu’ils soient politiques ou associatifs. Renforcer les réseaux passe également par une meilleure attention aux facteurs socioéconomiques de la santé, en intégrant les services sociaux et éducatifs, comme les associations d’alphabétisation et les CPAS, dans la prise en charge des patients. Dans une problématique aussi complexe que l’accès aux soins des migrants, il n’est pas facile actuellement d’avoir une vue d’ensemble de la situation en Belgique même si l’étude a veillé à avoir la meilleure représentativité possible tant des professionnels que des populations migrantes. En effet, ces résultats concernent des associations ou personnes exerçant dans trois communes de la région bruxelloise. Il est possible qu’une étude à l’échelon national apporte d’autres éléments avec lesquels travailler. De plus, les différences régionales et communautaires en termes d’organisation des soins et de politiques d’intégration des migrants ont certainement un rôle dans l’accès aux soins des migrants. Ce travail de récolte et d’analyse est achevé en Belgique mais il reste encore le volet européen à développer. Il est probable que d’autres résultats apparaitront avec des nuances liées au contexte migratoire des autres pays mais également à l’approche socio sanitaire et politique des migrants dans les pays concernés. Indépendamment des résultats, un élément relevé par l’équipe d’EUGATE est le manque de communications entre les différents pôles actifs dans le domaine de la santé des migrants. En effet, peu de contacts formels existent entre chercheurs, travailleurs de terrain, ONG et politiques. Chaque entité a son propre réseau de contact mais il n’existe pas de réseau clairement identifié dans lequel peuvent se mettre en commun les apports des différents secteurs. Ce réseau pourrait revêtir plusieurs formes : base de données interactives gérée par une plateforme, groupes de réflexion intersectoriels, publications de type newsletter sur les bonnes pratiques et activités dans le domaine de la santé des migrants… Il pourrait également devenir un interlocuteur des services publics en matière de santé et de migration. Face aux défis à relever en terme de santé et d’accès aux soins des migrants, EUGATE peut jouer un rôle de tremplin, devenir le point de départ d’une rencontre intersectorielle sur la santé et la migration en Belgique, réunissant les travailleurs de terrain, les associations et ONG, les chercheurs et les politiques. Son premier rendez-vous pourrait s’intéresser à identifier quels obstacles empêchent l’implémentation des facteurs de bonne pratique et quelles mesures concrètes prendre afin de permettre aux migrants de bénéficier d’un meilleur accès aux soins de santé en Belgique… Notamment, qui sont les migrants de Belgique ? Il reste encore des barrières à la collection des données « ethniques » en Belgique mais également en Europe. Les experts du processus Delphi insistent sur l’importante d’obtenir des données fiables et complètes sur l’état de santé des migrants. Si la récolte de ce type de données peut être perçue comme un moyen de contrôle de l’immigration ou un outil au service des politiques extrémistes, il est cependant nécessaire d’y accorder une attention plus grande [8]. Certains pays, comme le Royaume-Uni, ont introduit depuis longtemps cette variable dans leurs enquêtes de santé et l’utilisent au service de la population cible. Il serait donc judicieux que cette question soit à nouveau abordée avec toutes les exigences éthiques que cela comporte.
Connaitre les migrants, leur état de santé, leurs besoins, n’est-ce pas le premier pas vers un accès efficient à des soins de qualité ?
Bibliographie
[1] Personnes d’origine étrangère et personnes de nationalité étrangère non européenne vivant en Belgique avec un statut de séjour légal ou non, comprenant les réfugiés, les sans-papiers, les demandeurs d’asile, les primo-arrivants...
[2] Le protocole d’études demandait la sélection des capitales afin de disposer de données de comparaison.
[3] Sur base des données de l’Institut Belge de Statistiques www.statbel.fgov.be.
[4] Conseil National de l’Ordre des Médecins. Choix du médecin aux urgences et/ou pendant la garde, séance du 26 avril 2008. http://www.ordomedic.be/fr/avis/ conseil/Choix-du-m%E9decin-auxurgences- et-ou-pendant-la-garde.
[5] In Smeley B, Stith A, Nelson A (eds), 2003.
[6] Il n’existe pas de liste officielle des actes et autres prestations (exemple : les médicaments) pris en charge dans le cadre de l’aide médicale urgente. Quelques initiatives locales existent comme une liste commune aux 19 communes de Bruxelles.
[7] 12 décembre 1996. Arrêté royal relatif à aide médicale urgente octroyée par les centres publics d’aide sociale aux étrangers qui séjournent illégalement dans le Royaume. Texte intégral disponible sur www.ejustice.just.fgov.be.
[8] Voir aussi les travaux de Jacobs et Réa sur les concepts d’immigrés en Belgique, 2005.
Tous les trois mois, un dossier thématique et des pages « actualités » consacrés à des questions de politique de santé et d’éthique, à des analyses, débats, interviews, récits d’expériences...