La sécurité alimentaire préoccupe les citoyens. Eux aussi ont leur opinion et leurs idées à ce propos. La sécurité alimentaire ne peut pas être laissée uniquement aux soins de spécialistes. C’est pourquoi les trois partenaires ci- dessus ont mis en route un dialogue direct avec trente citoyens belges choisis au hasard. En l’occurrence, il s’agit d’un projet expérimental au moyen duquel une nouvelle approche a été mise à l’essai.
Tout d’abord, des exemples existants de dialogues semblables menés dans le pays et, surtout, à l’étranger, ont été repérés. Dans le même temps, des personnalités clés en Belgique ont été interviewées. Le thème proprement dit du dialogue a été choisi par le comité d’accompagnement « Sécurité alimentaire, à quel prix ? ». Ces dernières années beaucoup d’efforts ont été livrés pour améliorer la sécurité alimentaire. Pour autant, tous les risques peuvent-ils et doivent-ils être évités ? Jusqu’où doit-on aller pour dépister certaines sub- stances ? Et quelles sont, par exemple, les conséquences de réglementation en matière de sécurité alimentaire sur le goût et le prix de nos produits alimentaires ? Jusqu’où les consommateurs sont-ils prêts à aller dans ce domaine ? Un document de base a été rédigé à l’intention de ceux qui ont pris part au dialogue. Il s’agit d’un document aussi neutre que possible qui explique de manière simple et claire en quoi consiste la sécurité alimentaire. Au préalable, une discussion a également été menée sur le thème avec un certain nombre de groupes cibles spécifiques (personnes défavorisées, personnes à risque…).
C’est avec grande attention qu’il a été procédé à la sélection des trente citoyens et citoyennes. Un équilibre en matière d’appartenance linguistique, de sexe et une diversité d’âge, de profession, de formation et de situation familiale ont été recherchés.
Les trente citoyens sélectionnés se sont retrouvés pour un week-end à Bruxelles afin de mener un dialogue sur le thème de la sécurité alimentaire, avec l’aide de conseillers scientifiques. Aujourd’hui, nous pouvons rendre compte de ce dialogue. En tenant compte également du feedback donné aux citoyens du panel par le Comité consultatif de l’Agence alimentaire.
. Le concept de « sécurité alimentaire »
Du côté des autorités et des experts, le terme « sécurité alimentaire » se réfère à la contamination chimique et aux risques microbiologiques. Les citoyens associent eux la sécurité alimentaire d’une part à des notions telles que valeur nutritive, variété suffisante, authenticité, « naturel », santé et durabilité et, d’autre part, hygiène, fraîcheur, pureté et qualité des ingrédients.
. Définition du problème
Les autorités et les experts ont l’impression que les consommateurs n’acceptent pas de risques sur le plan de la sécurité alimentaire. À leur avis, le risque zéro est impossible à atteindre et, de plus, impayable. Pourtant, les citoyens disent eux ne pas exiger le risque zéro. Ceux-ci insistent surtout sur le fait qu’ils sont tenus dans l’ignorance concernant la chaîne alimentaire. Ils expliquent d’ailleurs que la méfiance vis-àvis de tout ce qui vise à aller plus loin en matière de technologie, globalisation et augmentation d’échelle dans le secteur alimentaire, est forte parce qu’un aperçu correct d’un secteur aussi complexe que celui de l’alimentation est pratiquement hors de portée. Tout en rappelant les expériences d’incidents négatifs dans un passé récent en matière de sécurité alimentaire.
. Les solutions proposées par les citoyens
Les citoyens mettent en doute l’hypothèse qu’une plus grande sécurité débouche automatiquement sur une augmentation de prix. Plutôt que de rechercher des réponses au problème exposé par les autorités, ils cherchent des ma nières de rendre les produits alimentaires suffisamment fiables sans que cela entraîne un coût plus élevé et ne constitue une menace pour la viabilité des petits producteurs et distributeurs. À cet égard, ils font une série de propositions. Les citoyens veulent avant tout se sentir en confiance face à leurs produits alimentaires. Afin de rétablir cette confiance, une information claire et complète est indispensable. À leur avis, une information est bien nécessaire, mais n’est pas une condition suffisante pour susciter la confiance. Le maintien et/ou le rétablissement de la confiance s’appuie sur une série d’autres conditions :
• rétablir le lien entre consommateur, producteur et chaîne de production ;
• améliorer la qualité de l’environnement ;
• revoir la qualité des méthodes de production utilisées ;
• assurer la qualité de la politique des autorités vis-à-vis de la sécurité alimentaire.
Les principaux accents des citoyens dans leurs suggestions à l’Agence alimentaire et au service public fédéral Santé publique, Sécurité de la chaîne alimentaire et Environnement sont :
• le souci de préserver la viabilité des petits producteurs et distributeurs ;
• le souci de maintenir les chaînes courtes ;
• la crainte d’augmentations possibles des prix ;
• un besoin impérieux de clarté à propos de la chaîne alimentaire ;
• un plaidoyer pour un certain réalisme ;
• un appel pour étudier les causes de la pollution.
. En général
Le fait que les citoyens et les autorités ne donnent pas le même contenu au concept « sécurité alimentaire » et aux problèmes qui s’y rapportent, met les autorités face à un important défi. Une politique (de communication) qui ne tiendrait pas compte de ces différences, ne produira pas un gain de confiance chez les consommateurs.
. Par secteur
Pour les instances publiques concernées, une consultation des citoyens via un panel offre, pendant la phase préparatoire d’une politique à mettre en oeuvre, une manière adéquate de se former une image nuancée des attentes des citoyens. Dans l’avenir, ces instances estiment un tel panel de consommateurs indiqué dans un contexte plus large relatif à l’alimentation et à la santé. Évidemment, les impacts budgétaires et de personnel doivent être soigneusement estimés.
Pour les secteurs concernés, ce dialogue n’a pas permis d’identifier des éléments aussi novateurs. Cependant, certains secteurs ont trouvé très enrichissant de pouvoir expliquer aux consommateurs la complexité des processus (de production).
Pour les organisations de consommateurs, ce dialogue direct a signifié une indéniable valeur ajoutée. Ils considèrent ce panel de consommateurs comme un instrument important afin d’arriver à un vrai dialogue au sujet des futures réglementations politiques entre autorités, secteurs et consommateurs.
. Quel suivi ?
Les autorités concernées, l’Agence alimentaire et le service public fédéral Santé publique, Sécurité de la chaîne alimentaire et Environnement, trouvent l’instrument « dialogue direct avec le citoyen » valable et envisagent des possibilités concrètes d’application au sein de leur organisation. Elles demandent alors qu’une attention particulière soit accordée au thème « alimentation et santé ». Afin de pouvoir influencer de manière efficiente et efficace les habitudes alimentaires vers une alimentation plus saine, le dialogue direct peut représenter une ressource très pertinente. Le « Plan national Nutrition Santé » et le « deuxième Plan fédéral de développement durable » sont des exemples d’initiatives des pouvoirs publics, qui constituent des contextes intéressants pour une telle approche. Du point de vue « gouvernance », la Fondation Roi Baudouin plaide pour la création d’une sorte de centre fédéral d’expertise, qui pourrait fonctionner surtout comme soutien méthodologique pour tous les services administratifs fédéraux souhaitant instaurer un dialogue direct avec les citoyens. .
Communiqué de la Fondation Roi Baudouin, avril 2005.
Tous les trois mois, un dossier thématique et des pages « actualités » consacrés à des questions de politique de santé et d’éthique, à des analyses, débats, interviews, récits d’expériences...