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Les médicaments jusque 17 fois moins chers - Se soigner au même prix partout en Europe ?


janvier 2009, France Defrenne

chargée de projet en Education permanente, Fédération des maisons médicales.

Ce vendredi 30 janvier, la Plate-forme d’Action Santé et Solidarité a organisé une tournée en car de Liège à Eijsden, de l’autre côté de la frontière hollandaise pour un ’paracetamolshopping’ dans l’objectif de sensibiliser les medias, et l’ouverture festive de la pharmacie « De Douanier » à la frontière hollandaise dans la commune de Meer (près de Hoogstraten).

Points de départ : l’adjudication « Kiwi »

Le 21 avril 2007, la Plateforme d’Action Santé et Solidarité a organisé avec sept cars de patients chroniques un « shopping paracétamol » vers la commune frontalière de Hulst aux Pays-Bas. Pour le prix d’une boîte de Dafalgan® dans une pharmacie belge, nous avons pu acquérir huit boîtes de paracétamol dans une grande surface hollandaise et six boites dans une pharmacie hollandaise. La raison de cette différence réside dans une procédure d’achat via adjudication par ces chaînes.

Cette action recueillit un grand succès médiatique et le porte-parole de l’industrie pharmaceutique (Pharma.be) promit dans un communiqué de presse que « Le paracétamol serait vite aussi moins cher en Belgique ». Mais nous n’avons rien vu changer.

Depuis 1 juillet 2008, les assureurs de soins privés aux Pays-Bas appliquent un modèle de type « Kiwi ». Ils ont organisé une enquête de marché pour 36 médicaments souvent prescrits et ont choisi de ne rembourser, pour chacun de ces médicaments que celui produit la firme qui offre le meilleur prix. Les conséquences de ce système sont spectaculaires. Le prix de l’antidépresseur le plus prescrit (le Cipramil®, dont le générique est le citalopram) est maintenant 5 à 15 fois moins cher aux Pays-Bas qu’en Belgique, l’inhibiteur de cholestérol le plus prescrit Zocor® (simvastatine) 5 à 7 fois, l’antihypertenseur le plus prescrit Amlor® (amlodipine) 6 à 9 fois moins cher, l’inhibiteur d’acide de l’estomac Losec® (omeprazole) 9 à 17 fois. Le gain pour les assureurs de soins néerlandais est d’ores et déjà estimé à 650 millions d’euros par an. Dans le tableau ci-joint, on trouve une comparaison de prix de neuf de ces 36 médicaments. Sept font partie du top-25 des médicaments les plus chers remboursés par l’INAMI. Les deux derniers ne sont pas remboursés en Belgique. Dans la troisième colonne on retrouve le prix mensuels : de la marque la plus chère en Belgique/ la moins chère en Belgique/ le ticket modérateur de la moins chère. La quatrième colonne donne le prix néerlandais pour la même quantité. La dernière colonne donne une estimation des économies pour l’INAMI si, pour ces 7 médicaments, nous appliquions les prix hollandais en Belgique. Le total se chiffre à 198,1 millions d’euros. Le patient économise en plus 66 millions d’euros.

Le tourisme des médicaments dans la région frontalière est de plus en plus répandu. Lors d’un débat de Welzijnszorg à Gent le 16/11/ 2008, un représentant de Welzijnsschakels racontait qu’outre les achats groupés de pommes de terre et de carottes chez le paysan local, ils vont aussi mensuellement en voiture aux Pays-Bas avec leurs prescriptions pour y acheter des médicaments. Cela n’est pas seulement intéressant pour le paracétamol, mais aussi pour les 36 médicaments souvent prescrits pour lesquels on applique là-bas le modèle Kiwi. Un Belge qui se présente avec une prescription d’un inhibiteur d’acide gastrique omeprazole 20 mg (original Losec®) pour 90 jours dans une pharmacie hollandaise paye 4,26 euros + 6 euros d’indemnité de livraison = 10,26 euros pour le prix plein. Cela est à peine plus, et souvent moins, que le ticket modérateur qu’il paye dans une pharmacie belge qui varie entre 9,23 euros et 18,74 euros selon le nom de marque prescrit. Si ce belge a pris sa carte Eurocross pour soins médicaux à l’étranger, il ne paye même rien. La mutuelle hollandaise récupère alors ces 10,26 euros à l’INAMI belge. Mais cela est beaucoup moins que les 27,68 euros à 56,22 euros que paierait l’INAMI belge si ce patient allait chercher son oméprazole dans une pharmacie belge. Donc une utilisation même « incorrecte » de cette carte peut rapporter beaucoup à la mutuelle belge et en plus rendre les médicaments gratuits pour le patient. Hallucinant ! Pour les médicaments contre le prostatisme et la migraine (en bas du tableau) la différence est encore plus intéressante vu que ces médicaments ne sont pas remboursés chez nous. Un patient belge avec une prescription pour 90 jours de tamsulosine (Omic®) paye en Hollande 6 euros + 6 euros de frais de livraison = 12 euros. En Belgique il paye pour la même quantité 60 euros. La différence est déjà 48 euros. S’il a pris sa carte Eurocross il ne paye rien en Hollande, vu que cette médication est remboursée là-bas.

L’action

C’est dans le cadre ’groupe médicaments’ que l’action du vendredi 30 janvier a eu lieu à Liège. Cette action était portée par l’ensemble de la plateforme.

Des patients se sont rendus dans une pharmacie belge et hollandaise le vendredi 30 janvier 2009 et ont comparé les prix des médicaments pour une même prescription.

Après s’être rendue dans une officine liégeoise pour y acheter, avec des patients malades chroniques, des médicaments sur prescription, la Plate-forme d’Action Santé et Solidarité a emmené les patients aux Pays-Bas où les mêmes médicaments sont nettement moins chers. Ils y ont acheté leurs médicaments habituels à un prix beaucoup plus avantageux et ont pu ainsi se rendre compte des économies réalisées.

Au même moment, en Flandre, une pharmacie fictive a été inaugurée à la frontière avec les Pays-Bas, dans la commune de Meerle. Les patients belges y ont obtenu des produits aux tarifs néerlandais.

Depuis l’application par les Pays-Bas, le 1er juillet 2008, du modèle kiwi [1] à une trentaine de médicaments remboursés, les baisses de prix réalisées sont étonnantes et les gains des organismes assureurs privés néerlandais sont déjà estimés à 750 millions d’euros par an. Si nous appliquions en Belgique ces prix à 7 médicaments repris dans le top 25 des médicaments les plus onéreux de l’INAMI, cela représenterait 198,1 millions d’euros d’économie pour l’assurance maladie. Du côté des patients, l’économie se chiffrerait à 66 millions d’euros !

Les tableaux ci-joints démontrent qu’il reste une marge de manoeuvre substantielle pour diminuer les prix des médicaments, en faveur des patients et de l’INAMI. Aussi, la Plate-forme d’Action Santé et Solidarité invite le Gouvernement à réfléchir à des pistes d’action et à les concrétiser le plus rapidement possible. .

Deux sites intéressants à consulter :

kiesbeter.nl

www.cbip.be

Sources pour ces comparaisons de prix :

www.bcfi.be

www.kiesbeter.nl

http://www.riziv.fgov.be/drug/nl/statistics-scientific-information/pharmanet/info-spot/2008-10-03/index.htm

[1La méthode kiwi consiste à mettre en concurrence les spécialités pharmaceutiques qui contiennent des principes actifs ayant les mêmes indications thérapeutiques. Chaque firme pharmaceutique propose un prix pour son médicament : la firme proposant le meilleur prix remporte le marché et seul son médicament est remboursé.

Cet article est paru dans la revue:

n° 47 - janvier 2009

Santé, pour tous ? !

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Tous les trois mois, un dossier thématique et des pages « actualités » consacrés à des questions de politique de santé et d’éthique, à des analyses, débats, interviews, récits d’expériences...

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