Sage-femme, une fonction « de première ligne » qui existe depuis la nuit des temps mais dont la médicalisation de la grossesse et de l’accouchement avait oblitéré l’existence et qui, peu à peu, retrouve aujourd’hui la place qu’elle mérite.
Infirmière sociale de formation, puis infirmière accoucheuse (terme ancien aujourd’hui remplacé par celui de sage-femme), j’ai travaillé 14 ans à l’hôpital et 14 ans dans l’enseignement. Aujourd’hui, j’ai choisi de travailler de manière plus globale à la prise en charge d’un couple autour de l’arrivée d’un bébé et je suis sage-femme libérale, une fonction qui existe depuis la nuit des temps et qui répond à un besoin des femmes. J’exerce au plus proche des gens et hors du contexte hospitalier, que ce soit en maison de naissance ou à domicile. Proximité, accessibilité et professionnalisme sont des valeurs qui rattachent en effet la fonction de sage-femme à la première ligne de soins de santé.
Il s’agit réellement d’un accompagnement global de la maternité physiologique, basé sur les recommandations scientifiques internationales. La sage-femme (qui peut être un homme) est gardienne de l’eutocie, c’est-à-dire de tout ce qui concourt au bon déroulement de l’accouchement, mais aussi de la santé des femmes et des bébés. De nombreux couples apprécient la complémentarité entre une sage- femme, spécialiste de la physiologie dans une approche globale avec eux et avec le bébé à venir, et le médecin qui fait des consultations de type plus technique, spécialisé lui pour la pathologie. Il est primordial d’éviter toute médicalisation systématique pour ne pas en induire d’autres en cascades (effet domino).
La sage-femme rencontre le couple dès le diagnostic de grossesse et parfois même dès la consultation préconceptionnelle, afin de voir si leur projet rencontre ses compétences de sage- femme. Elle surveille la grossesse en parallèle avec le gynécologue référent de la patiente. Le gynécologue réalise les trois échographies conseillées par l’Evidence based medicine (EBM), à 12, 22 et 32 semaines. Si rien d’inquiétant n’a été repéré au cours de ce suivi et que le bébé est en présentation céphalique, le travail doit commencer de manière spontanée entre 37 et 42 semaines d’aménorrhée (périodes sans menstruations). A ce moment, la sage-femme garde son autonomie pour la pratique de l’accouchement ; il en est de même si l’après-accouchement reste physiologique.
La sage-femme participe ainsi à la promotion de la santé de la femme et du jeune enfant en renforçant l’information, l’écoute et les compétences de chacun.
Quelle est la différence entre une sage-femme et une infirmière ?
Les sages-femmes sont souvent considérées comme des infirmières car, avant septembre 1993, il était courant que la formation de sage-femme passe, au préalable, par celle d’infirmière. Aujourd’hui, même si des passerelles entre les deux formations sont possibles, les études (quatre ans) sont bien distinctes et attribuent des titres spécifiques. La sage-femme exerce une partie de l’art de guérir depuis la loi de 1818 (et l’infirmière, de l’art de soigner). Une infirmière ne peut en aucun cas réaliser des prestations obstétricales.
Les demandes de suivi de grossesse et d’accouchement par une sage-femme sont en croissance. Il y a à cela plusieurs raisons. De nombreux couples cherchent une alternative à une approche médicalisante qui devient excessive ; certaines maternités fonctionnent sur des critères qui ne correspondent pas vraiment aux besoins des femmes et des bébés. Pour beaucoup, l’outil Internet a permis de découvrir l’existence des sages-femmes et de pouvoir les contacter. Les forums sur le sujet deviennent des espaces de causerie où on peut, sous couvert de l’anonymat, se con er et s’entraider. Petit à petit, les compétences des sages femmes sont ainsi médiatisées et appréciées. En outre, il existe maintenant de bonnes formations spécifiques en quatre ans, eurocompatibles.
Malgré tout cela, c’est une profession encore mal reconnue et pour laquelle la défense professionnelle prend pas mal de temps (en moyenne j’y consacre un jour par semaine). Ce problème de reconnaissance - et même de connaissance de notre profession - sévit tant dans le public que chez les professionnels de la santé. Situation regrettable que nous espérons améliorer dans l’avenir car une prise en charge la plus précoce possible nous éviterait de recueillir des couples plein d’angoisses à cause du discours habituel autour de la grossesse et de l’accouchement…
Les prestations de la sage-femme
Sous leur propre responsabilité, les sages-femmes peuvent effectuer :
• la surveillance de la grossesse normale ;
• la surveillance de grossesses « à risque » (sur prescription médicale) ;
• la préparation à l’accouchement, individuelle ou collective ;
• la surveillance et l’assistance pendant la phase de travail ;
• l’accouchement et/ou l’assistance lors de l’accouchement (par un médecin ou une autre accoucheuse) ;
• pratique ou assistance de l’accouchement (réalisé par un médecin ou autre sage-femme) ;
• les soins post-natals.
Grâce à l’élargissement de leurs compétences dans le nouvel arrêté royal 78, les sages-femmes pourront prochainement :
• prescrire certains médicaments en rapport avec la grossesse, l’accouchement et les suites de couches ;
• réaliser des échographies simples ;
• réaliser la rééducation du périnée ;
• suivre une formation continue avec agrément.
Site à visiter :
Tous les trois mois, un dossier thématique et des pages « actualités » consacrés à des questions de politique de santé et d’éthique, à des analyses, débats, interviews, récits d’expériences...